DIMANCHE IV.
POurquoi adjoustes-tu qu'il est Crea∣teur du ciel & de la terre?
Pource qu'il s'est manifesté à nous par ses oeuvres, il faut qu'en elles nous le cher∣chions. Car nostre entendement n'est pas capable de comprendre son Essence: mais le monde nous est comme un miroir auquel nous le pouvons contempler, selon qu'il nous est expedient de le connoistre.
Par le ciel & la terre n'entens-tu pas lè reste des creatures?
Si fai: mais elles sont comprises sous ces deux mots, à cause qu'elles sont toutes ce∣lestes ou terriennes.
Pourquoi appelles-tu Dieu seulement Createur, veu qu'entretènir & conserver toûjours les creatures en leur estat, est beau∣coup plus que de les avoir une fois creées?
Aussi par cela n'est-il pas seulement signifié qu'il ait pour un coup mis ses oeu∣vres en nature, afin de les delaisser puis apres sans s'en soucier plus: mais il faut entendre que comme le monde a esté fait par lui au commencement, aussi mainte∣nant il l'entretient en son estat: tellement que le ciel, la terre, & toutes les creatures ne subsistent en leur estre sinon par sa ver∣tu. Davantage, puis qu'il tient ainsi toutes choses en sa main, il s'ensuit qu'il en a le gouvernement & maistrise. C'est pourquoi entant qu'il est Createur du ciel & de la terre, c'est lui qui conduit par sa bonté, vertu, & sagesse tout l'ordre de la nature: envoye la pluye & la secheresse, les gresles, les tempestes, & le beau temps, fertilité, & sterilité, santé & maladie: en somme, il a toutes choses à commandement, pour s'en servir selon qu'il lui semble bon.
Touchant les diables & les méchans, lui sont-ils aussi bien sujets?
Combien qu'il ne les conduise pas par son saint Esprit, toutesfois il leur tient la bride en telle sorte, qu'ils ne se pourroient bouger, sinon autant qu'il leur permet. Et mesmes il les contraint d'executer sa volon∣té, bien que ce soit contre leur intention & propos.
Dequoi te sert-il de sçavoir cela?
De beaucoup. Car ce seroit une pauvre chose si les diables & les iniques avoient le po$voir de rien faire malgré la volonté de Dieu. Et mesme nous ne pourrions jamais avoir repos en nos consciences, d'autant que nous serions en leur danger: mais quand nous sçavons que Dieu leur tient la bride serrée, tellement qu'ils ne peuvent rien que par son congé, en cela nous avons