Nouvelles études sur l'histoire de la pensée scientifique, par G. Milhaud.

LA PENSEE MATHEMATIQUE

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simple qu'elle parait. - L'observation exacte, impartiale, des faits est la chose du monde la plus difficile,
et qui demande le plus de maturite d'esprit, le plus
d'ind6pendance de jugement. II semble ais6 de n'avoir
qu'a ouvrir les yeux pour noter ce qui se passe devant
nous. En realit6, nous ne voyons vraiment que si deja
nous sommes assez maitres de nous pour ne pas projeter au dehors mille d6sirs et mille prejuges. L'experience "a laquelle je faisais allusion a ete refaite par les
commentateurs d'Aristote, tous revoient ce qu'a vu le
maitre. Une fois, a propos de la pesee d'une vessie
d'abord pleine d'air, puis degonfl6e, Simplicius se
permet de trouver un r6sultat diff6rent de celui d'Aristote: bien vite, il ajoute qu'il a du se tromper. Avec
quelle facilite nous demandons aux constatations de
l'exp6rience, sous toutes ses formes, ce que nous vouIons y trouver! Les progres de la science et de la r6 -flexion ont depuis cent cinquante ans aiguis6 notre sens
critique au point que,meme en dehors des sciences physiques, meme la ou nous n'avons pour nous aider aucun
instrument de precision, comme dans l'etude des textes,
des langues, des moeurs, des institutions, le nombre de
ceux qui s'efforcent de voir et de juger en veritables
savants va sans cesse en croissant dans tous les pays
civilises. Mais quelle education anterieure suppose ce
sens critique affine, quelle culture rationnelle, quelle
lib6ration du poids lourd de tout un passe de superstitions et de prejuges! Comme il 6tait plus simple et plus
aise6 l'esprit humain de s'essayer a la liberte en s'elancant dans les reveries abstraites de la mathematique; comme il devait se sentir lha l'abri de toute
autorite ext6rieure; comme il lui etait naturel de
puiser dans le succes de ses efforts, dans la lumineuse
clarte de ses creations et dans leur f6condite, le cou