Les œuvres libertines de Cyrano de Bergerae ... / précédées d'une notice biographique par Frédéric Lachèvre.

LE PEDANT JOUE, COMEDIE 91 GRANGER N'en prenez pas la peine, je me consoleray bien moy-mesme. Je sens ddja mon dme s'endurcir aux afflictions, aussi Nature quand elle me bastit avoit gag, contre la Fortune et la Mort qu'elle petriroit un Homme qui luy feroit perdre escrime, aussi je me sens nay tout propre a faire radoter cette Damoiselle aux yeux clos. Je la vis, ce me semble, une nuit travestie en Medecin, elle s'approchoit de mon chevet et ne pensant pas estre connue pour un Docteur de la faculte, elle me demanda quand la fievre m'avoit prise. ( Trop tost, luy repliquay-le. - Mais encore ou vouts tient le mal? ) Je luy repondis qu'il me tenoit entre deux draps. Elle adjousta, ( Si je ne poutvois avaler mes jambes. ) Je l'assuray que je n'avalois plus rien sans maschaer, ( Mais, reprit-elle, vous raillez et cependant vous voila deja' bien bas. - II ne s'en faut que le lit que je ne touche a terre. - H6, mon ami, dit-elle, pour conclusion, recommandez-vous a Dieu. - Quelqu'un y va-t-il, luy repartis-je. - ous-mesme tout it 1'heure, dit-elle. n Je l'asseuray que je ferois donc bien mes recommandations moy-nmesme. Alors s'appercevant que je l'avois reconnue: 1 He bien, me dit-elle, il est vray, je suis la Mort, je viens icy pour t'avertir que tu mourras. - II le faut bien puisque j'ay vescu )), luy repondis-je effrontement. - Mais ( bientost ), dit-elle. - J'en seray plustost quitte. - Tu laisseras ta teste stur un echafaut. - II ne m'importe de mourir d'estoc ou de taille, mais afin de vous oster la peine de tant de menasses je vais, pour vous soulager, tascher de m'effrayer moy-mesme: o Donc, d mon corps, je t'avertis qu'avant de rendre I'dme, tu souffriras plusieurs coups de la main d'un bourreatt. - N'importe, il n'y en scauroit avoir qu'un qui fasse mourir. - Ce sera en pais 6tranger. - II n'y a qu'un chemin pour descendre aux Enfers. - Tu resteras sans sepulture. - Le Ciel me couvrira. - Tu scras affligd d'une fievre bien longue. - Je ne mourray donc pas subitement. - Tu seras chass6 de ta patrie. - Ma patrie est tous les lieux oui je me trouve bien. - Tu perdras les yeux. - J'en dormiray davantage Tu ne verras rien de beau ni rien de laid. Tu deviendras manchot. - Je ne seray pas au hazard d'estre accus6 d'homicide. Voila seiche et decharnee Damoiselle les coups que j'imagine les plus sensibles, toutefois ils ne m'etonnent point. Si vous en scavez d'autres, chantez. ) Cette orgueilleuse Pel6e se trouva si camuse de voir ainsi chiffonner sa tyrannie qu'elle me pardonna comme je luy pardonne! a) 1654: K 0 Tempora! 6 Mores! * Fin du Pddant joud.

/ 350
Pages

Actions

file_download Download Options Download this page PDF - Page 91 Image - Page 91 Plain Text - Page 91

About this Item

Title
Les œuvres libertines de Cyrano de Bergerae ... / précédées d'une notice biographique par Frédéric Lachèvre.
Author
Cyrano de Bergerac, 1619-1655.
Canvas
Page 91
Publication
Paris, :: E. Champion,
1921.

Technical Details

Link to this Item
https://name.umdl.umich.edu/aju6718.0008.002
Link to this scan
https://quod.lib.umich.edu/g/genpub/aju6718.0008.002/97

Rights and Permissions

These pages may be freely searched and displayed. Permission must be received for subsequent distribution in print or electronically. Please go to http://www.umdl.umich.edu/ for more information.

Manifest
https://quod.lib.umich.edu/cgi/t/text/api/manifest/genpub:aju6718.0008.002

Cite this Item

Full citation
"Les œuvres libertines de Cyrano de Bergerae ... / précédées d'une notice biographique par Frédéric Lachèvre." In the digital collection Digital General Collection. https://name.umdl.umich.edu/aju6718.0008.002. University of Michigan Library Digital Collections. Accessed June 23, 2025.
Do you have questions about this content? Need to report a problem? Please contact us.