PSEAUME LXVIII.
Pseaume de loüange & de reconnoissance publique. Exurgat Deus.
〈♫〉〈♫〉 QUe Dieu se montre seulement,
〈♫〉〈♫〉 Et on verra soudainement
〈♫〉〈♫〉 Abandonner la place:
〈♫〉〈♫〉 Le camp des ennemis épars,
〈♫〉〈♫〉 Et ses haineux de toutes parts
〈♫〉〈♫〉 Fuïr devant sa face.
〈♫〉〈♫〉 Dieu les fera tous enfuïr,
〈♫〉〈♫〉 Ainsi qu'on voit s'évanouïr
〈♫〉〈♫〉 Un amas de fumée:
〈♫〉〈♫〉 Comme la cire aupres du seu,
〈♫〉〈♫〉 Ainsi des méchans devant Dieu
〈♫〉〈♫〉 La force est consumé e.
¶ Cependant devant le Seigneur
Les justes chantent son honneur
En toute éjouïssance:
Et de la grand' joye qu'ils ont
De voir les méchans qui s'en vont,
Sautent à grand' puissance.
Chantez du Seigneur le renom,
Psalmodiez, Ioiiez son Nom,
Et sa gloire immortelle:
Car sur la nuë il est porté,
Et d'un nom plein de ma$esté,
L'Eternel il s'appelle.
¶ Réjouïssez-vous devant lui,
Qui est des pauvres sans appui
Le pere debonnaire:
Qui le droict des veuves foustient,
Devant Dieu, dis-je, qui se tient
En son saint Sanctuaire.
Dieu fait avoir pleine maison
A ceux qui ont longue saison
Sans nuls enfans soufferte:
Delivre les siens enferrez,
Tient les rebelles enserrez
En leur terre deserte.
{inverted ⁂} 1 ¶ Lors que ton peuple tu menois,
O Dieu, & que tu cheminois
Par le desert horrible,
Les cieux fondirent en sueur:
La terre trembla de la peur
De ta face terrible.
Le mont de Sion ébranlé,
Dieu, Dieu d'Israël a branlé
Regardant ton visage:
C'est toi, puissant Dieu, qui as fait
Degoutter la pluye à souhait
Dessus ton heritage.
¶ Quand il a esté mal en poinct,
Tu l'as redressé de tout poinct,
Là les troupeaux demeurent:
Tu l'emplis de biens infinis,
Dont les plus pauvres tu fournis,
Que sans secours ne meurent.
C'est toi, Seigneur, par ta bonté,
Qui as l'argument presenté
A l'armée pudique
De nos pucelles qu'on ouït,
Lors que l'ennemi s'enfuït,
Prononcer ce cantique:
¶ Or s'en sont fuïs les grands Rois,
Les grands Rois, dis-je, & leurs arrois
S'en sont suïs grand' erre:
Celles qui n'avoient point sorti
De la maison, ont départi
Et leurs biens & leur terre.
Quoi que ternis & bazanez
Des ennuis qu'on vous a donnez,
Vous ne differiez gueres
De ceux que l'on voit tous noircis
D'avoir esté toûjours assis
A l'ombre des chaudieres.
¶ Vous reluirez comme feroit
L'aile d'un pigeon qui seroit
De fin argent brunie:
Dont le pennage estincelant
Fait sembler l'aile en Pair volant
De plus fin or jaunie.