Les Pseaumes de David mis en rime Françoise par Clem. Marot & Theodore De Beze.

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Title
Les Pseaumes de David mis en rime Françoise par Clem. Marot & Theodore De Beze.
Author
Marot, Clément, 1495?-1544.
Publication
A Londres :: Imprimé par R. Everingham, & se vend chez R. Bentley ... et chez J. Hindmarsh ...,
M.DC.LXXXVI [1686]
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Subject terms
Bible. -- O.T. -- Psalms -- Paraphrases, French.
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"Les Pseaumes de David mis en rime Françoise par Clem. Marot & Theodore De Beze." In the digital collection Early English Books Online 2. https://name.umdl.umich.edu/A28038.0001.001. University of Michigan Library Digital Collections. Accessed June 2, 2024.

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Avertissement aux Lecteurs touchant le Catechisme.

C'A esté une chose que l'Eglise a toûjours euë en une singuliere recommantlation, d'instruire les petits enfans en la doctrine Chrestienne. Et your ce faire, non seulement on avoit anciennement les Escoles, & commandoit-on à un chacun de bien endoctriner sa famille: man aussi l'ordre public estoit par les temples, d'examiner les petits enfans sur les points qui doivent estre communs entre tous les Chrestiens. Et afin de procéder par ordre, on usoit d'un for mulaire, qu$on nommoit CATECHISME. Depuis, le diable en dissipant l'Eglise, & faisant l'horrible ruine dont on voit encores les enseignes en la plûpart du monde, a détruit cette sainte police, & n'a laissé que je ne sçai quelles reliques, qui ne peuvent sinon engendrer superstition, sans aucunement edifier. C'est la Confirmation, qu'on appelle, où il n'y a que singeries, sans au∣cun fondement. Ainsi, ce que nous mettons en avant, n'est sinon l'usage qui de toute ancienneté à esté observe entre les Chrestiens: & n'a jamais esté delaissé, que quand l'Eglise a esté du tout corrompuë.

LE CATECHISME, C'est à dire, LE FORMULAIRE D'INSTRUIRE les enfans en la Chrestienté, fait en maniere de Dialogue, où le Ministre inter∣roge, & l'Enfant répond.

DES ARTICLES DE LA FOI.

DIMANCHE I.
Le Ministre.

QUelle est la principale fin de la vie humaine?

L'Enfant.

C'est de connoistre Dieu.

M.

Pourquoi dis-tu cela?

E.

Pource qu'il nous a créez & mis au mon∣de pour estre glorifié en nous. Et il est bien raisonnable que nous rapportions nostre vie à sa gloire, puis qu'il en est le commen∣cement.

M.

Et quel est le souverain bien des hom∣mes?

E.

Cela mesme.

M.

Pourquoi l'appelles-tu le souverain bien?

E.

Pource que sans cela nostre condition est plus mal-heureuse que celle des bestes brutes.

M.

Par cela donc nous voyons qu'il n'y a nul si grand mal-heur que de ne vivre pas selon Dieu?

E.

Il est vrai.

M.

Mais quelle est la vraye & droite con∣noissance de Dieu?

E.

Quand on le connoist afin de l'honorer.

M.

Quelle est la maniere de le bien ho∣norer?

E.

C'est que nous ayons toute nostre fi∣ance en lui: que nous le servions en obeïs∣sant à sa volonté: que nous le requerions en toutes nos necessitez, cherchans en lui salut & tous biens, & que nous reconnois∣sions tant de coeur que de bouche, que tout bien procede de lui seul.

DIMANCHE II.
M.

OR afin que ces choses soient dedui∣tes par ordre, & exposées plus au long, quel est le premier poinct?

E.

C'est d'avoir nostre fiance en Dieu.

M.

Comment cela se peut-il faire?

E.

C'est premierement de le connoistre tout-puissant & tout bon.

M.

Suffit-il de cela?

E.

Non.

M.

La raison?

E.

Pource que nous ne sommes pas dignes qu'il demontre sa puissance pour nous aider, ni qu'il use de sa bonté envers nous.

M.

Que faut il donc plus?

E.

Que nous soyons certains qu'il nous ai∣me & nous veut estre Pere & Sauveur.

M.

Comment connoissons-nous cela?

E.

Par sa Parole, où il nous declare sa misericorde en Jesus Christ, & nous asseure de sa dilection envers nous.

M.

Le fondement donc d'avoir vraye si∣ance

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en Dieu, c'est de le connoistre en Jesus Christ?

E.

Ouï.

M.

Mais quelle est en somme la substance de cette connoissance?

E.

Elle est comprife en la confession de foi que font tous les Chrestiens, laquelle on appelle communement le Symbole des Apostres: pource que c'est un sommaire de la vraye creance qu'on a toûjours tenu en la Chrestienté: & aussi qui est tirée de la pure doctrine Apostolique.

M.

Recite ce qui y est dit.

E.

JE croi en Dieu le Pere Tout-puissant, Createur du ciel & de la terre. Et en Jesus Christ son Fils unique nostre Seigneur: qui a esté conceu du Saint Esprit, né de la Vierge Marie. A souffert sous Ponce Pilate, a esté crucifié, mort, & enseveli. Est de∣scendu aux enfers. Le troisiéme jour est ressus∣cité des morts: Il est menté aux Cieux: Il est assis à la dextre de Dieu le Pere Tout-puis∣sant. Et de là il viendra juger les vivans & les morts. Je croi au Saint Esprit. Je croi la sainte Eglise universelle: La communion des Saints: La remission des pechez: La resur∣rection de la chair: La vie eternelle. Amen.

DIMANCHE III.
M.

POur bien expliquer cette Confes∣sion par le menu, en combien de parties la diviserons-nous?

E.

En quatre principales.

M.

Quelles?

E.

La premiere sera de Dieu le Pere. La seconde, de son Fils Jesus Christ, en la∣quelle est recitée toute l'histoire de nostre redemption. La troisiéme, du Saint Esprit. La quatriéme, de l'Eglise, & des graces de Dieu envers elle.

M.

Veu qu'il n'y a qu'un Dieu, qui te meut de reciter le Pere, le Fils, & le Saint Es∣prit, qui sont trois?

E.

Pource qu'en une seule Essence Divine nous avons à considerer le Pere, comme le commencement & l'origine, ou la cause premiere de toutes choses: Puis a∣pres son Fils, qui est sa Sagesse eternelle: le Saint Esprit, qui est sa vertu & puissance, laquelle est épanduë sur toutes creatures, & neanmoins reside toûjours en lui.

M.

Par cela tu veux dire qu'il n'y a nul in∣convenient, qu'en une mesme Divinité nous comprenions distinctement ces trois personnes, & que Dieu n'est pas pourtant divisé?

E.

Il est ainsi.

M.

Recite maintenant la premiere partie.

E.

Je croi en Dieu le Pere Tout-puissant, Crea∣teur du ciel & de la terre.

M.

Pourquoi le nommes tu Pere?

E.

C'est au regard de Jesus Christ, qui est la Parole eternelle, engendrée de lui devant les siecles, puis estant manifesté au monde, a esté approuvé & declaré estre son Fils. Mais entant que Dieu est Pere de Jesus Christ, de là il s'ensuit qu'il est aussi le no∣stre.

M.

Comment entens-tu qu'il est Tout-puis∣sant?

E.

Ce n'est pas seulement à dire qu'il ait le pouvoir, ne l'exerçant pas: mais qu'il a toutes les creatures en sa main & sujettion: qu'il dispose toutes choses par sa provi∣dence, gouverne le monde par sa volonté, & conduit tout ce qui se fait selon que bon lui semble.

M.

Ainsi selon ton dire, la puissance de Dieu n'est pas oisive, mais emporte da∣vantage, affavoir qu'il a toûjours la main à l'ouvrage: & que rien ne se fait sinon par lui, ou avec son congé & son ordonnance?

E.

Il est ainsi.

DIMANCHE IV.
M.

POurquoi adjoustes-tu qu'il est Crea∣teur du ciel & de la terre?

E.

Pource qu'il s'est manifesté à nous par ses oeuvres, il faut qu'en elles nous le cher∣chions. Car nostre entendement n'est pas capable de comprendre son Essence: mais le monde nous est comme un miroir auquel nous le pouvons contempler, selon qu'il nous est expedient de le connoistre.

M.

Par le ciel & la terre n'entens-tu pas lè reste des creatures?

E.

Si fai: mais elles sont comprises sous ces deux mots, à cause qu'elles sont toutes ce∣lestes ou terriennes.

M.

Pourquoi appelles-tu Dieu seulement Createur, veu qu'entretènir & conserver toûjours les creatures en leur estat, est beau∣coup plus que de les avoir une fois creées?

E.

Aussi par cela n'est-il pas seulement signifié qu'il ait pour un coup mis ses oeu∣vres en nature, afin de les delaisser puis apres sans s'en soucier plus: mais il faut entendre que comme le monde a esté fait par lui au commencement, aussi mainte∣nant il l'entretient en son estat: tellement que le ciel, la terre, & toutes les creatures ne subsistent en leur estre sinon par sa ver∣tu. Davantage, puis qu'il tient ainsi toutes choses en sa main, il s'ensuit qu'il en a le gouvernement & maistrise. C'est pourquoi entant qu'il est Createur du ciel & de la terre, c'est lui qui conduit par sa bonté, vertu, & sagesse tout l'ordre de la nature: envoye la pluye & la secheresse, les gresles, les tempestes, & le beau temps, fertilité, & sterilité, santé & maladie: en somme, il a toutes choses à commandement, pour s'en servir selon qu'il lui semble bon.

M.

Touchant les diables & les méchans, lui sont-ils aussi bien sujets?

E.

Combien qu'il ne les conduise pas par son saint Esprit, toutesfois il leur tient la bride en telle sorte, qu'ils ne se pourroient bouger, sinon autant qu'il leur permet. Et mesmes il les contraint d'executer sa volon∣té, bien que ce soit contre leur intention & propos.

M.

Dequoi te sert-il de sçavoir cela?

E.

De beaucoup. Car ce seroit une pauvre chose si les diables & les iniques avoient le po$voir de rien faire malgré la volonté de Dieu. Et mesme nous ne pourrions jamais avoir repos en nos consciences, d'autant que nous serions en leur danger: mais quand nous sçavons que Dieu leur tient la bride serrée, tellement qu'ils ne peuvent rien que par son congé, en cela nous avons

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occasion de nous reposer & rejouïr, veu que Dieu promet d'estre noslre protecteur, & de nous dessendre.

DIMANCHE V.
M.

VEnons maintenant à la seconde partie.

E.

Et en Jesus Christ son Fils, &c.

M.

Que contient-elle en somme?

E.

C'est que rous reconnoislions le Fils de Dieu pour nostre Sauveur, & le moyen comme il nous a delivrez de la mort, & acquis le salut.

M.

Que signifie ce mot de Jesus, par le∣quel tu le nommes?

E.

C'est à dire, Sauveur, & lui a esté im∣pose de l'Ange par le commandement de Dieu.

M.

Cela vaut-il plus, que s'il eust receu ce nom des hommes?

E.

Ouï bien: car puis que Dieu veut qu'il soit ainsi appellé, il faut qu'il soit tel à la verité.

M.

Que veut dire puis apres le mot de Christ?

E.

Par ce titre est encore mieux declaré son office: c'est qu'il a esté oinct du Pere celeste, pour estre ordonné Roi, Prestre, ou Sacrificateur, & Prophete.

M.

Comment sçais-tu cela?

E.

Pource que felon l'Ecriture, l'onction doit servir à ces trois choses. Et aussi elles lui sont attribuées plusieurs fois.

M.

Mais de quel genre d'huile a-t'il esté oinct?

E.

Ce n'a pas esté d'une huile visible, com∣me les anciens Rois, Sacrificateurs & Pro∣phetes: mais ç'a esté des graces du S. Es∣prit, qui est la verité de cette onction ex∣terieure qui se faisoit le temps passé.

M.

Quel est ce Royaume dont tu parles?

E.

Il est spirituel, & consiste en la parole & en l'Esprit de Dieu, qui contiennent ju∣stice & vie.

M.

Et la Sacrificature?

E.

C'est l'office & authorité de se repre∣senter devant Dieu, pour obtenir grace & saveur, & appaiser son ire, en offrant un sacrifice qui lui soit agreable.

M.

Comment est-ce que tu dis Jesus Christ Prophete?

E.

Pource qu'en descendant au monde, il a esté messager & ambassadeur souverain de Dieu son Pere, pour exposer pleinement la volonté d'icelui au monde, & ainsi mettre fin à toutes propheties & revelati∣ons.

DIMANCHE VI.
M.

TE revient-il quelque prosit de cela?

E.

Le tout est à nostre utilité. Car Jesus Christ a receu tous ces dons pour nous en faire participans, afin que nous recevions tous de sa plenitude.

M.

Declare moi cela plus au long.

E.

Il a receu le Saint Esprit avec toutes ses graces en perfection, pour nous en élar∣gir & distribuer à chacun, felon la mesure & portion que Dieu connoist estre expe∣diente. Et ainsi nous puisons de lui comme d'une fontaine tout ce que nous avons de biens spirituels.

M.

Son Royaume dequoi nous sert-il?

E.

C'est qu'estans par lui mis en liberté de conscience, & remplis de ses richeses spirituelles, pour vivre en justice & sainte∣té, nous avons aussi la puislance de vaincre le diable, le peché, la chair, & le monde, qui sont les ennemis de nos ames.

M.

Et sa Sacrificature?

E.

Premierement, entant qu'il est nostre Mediateur pour nous reconcilier à Dieu son Pero: puis apres, que par son moyen nous avons accez pour nous presenter aussi à Dieu, & nous offrir en sacrifice, avec tout ce qui procede de nous. Et en cela nous sommes compagnons de sa Sacrificature.

M.

Il reste la Prophetie.

E.

Puis que cét office a esté donné au Sei∣gneur Jesus pour estre maistre & docteur des siens, la fin est de nous introduire à la vraye connoissance du Pere & de sa veri∣té, tellement que nous soyons écoliers do∣mestiques de Dieu.

M.

Tu veux donc conclurre que ce titre de Christ comprend trois offices que Dieu a donnez à son Fils pour en communiquer le fruit & la vertu à ses fideles?

E.

Ouï.

DIMANCHE VII.
M.

POurquoi l'appelles-tu Fils unique de Dieu, Veu que Dieu nous ap∣pelle tous ses enfans?

E.

Ce que nous sommes enfans de Dieu ce n'est pas de nature, mais seulement par adoption & par grace, entant que Dieu nous veut reputer tels. Mais le Seigneur lesus, qui est engendré de la substance de son Pere, & est d'une mesme essence, à bon droit est dit Fils unique: car il n'y a que lui seul qui soit naturel.

M.

Tu veux donc dire que cét honneurest propre à lui seul, & lui appartient natu∣rellement: mais qu'il nous est communi∣qué de don gratuit, entant que nous som∣mes ses membres?

E.

C'est cela. Et pourtant au regard de cette communication il est dit ailleurs, Le premier né entre plusieurs freres.

M.

Comment est-ce qu'il est nostre Sei∣gneur?

E.

Comme il a esté constitué du Pere, afin qu'il nous ait en son gouvernement, pour exercer le Royaume & la Seigneurie de Dieu au ciel & en la terre, & pour estre Chef des Anges & des fideles.

M.

Que veut dire ce qui s'ensuit apres?

E.

Il declare comme le Fils de Dieu a e∣sté oinct du Pere pour nous estre Sauveur: c'est assavoir, en prenant nostre chair hu∣maine, & accomplissant les choses requises à nostre redemption, comme elles sont ici recitées.

M.

Qu'entens-tu par ces deux mots, Con∣ceu du Saint Esprit, Né de la Vierge Ma∣rie?

E.

Qu'il a esté formé au ventre de la Vi∣erge Marie, & de la propre substance d'i∣celle, pour estresemence de David, comme il avoit esté predit: & neanmoins que cela s'est fait par operation miraculense du

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S. Esprit, sans compagnie d'homme.

M.

Estoit-il donc requis qu'il vestist nostre propre chair?

E.

Ouï, d'autant qu'il falloit que la deso∣beïssance commise contre Dieu par l'hom∣me fust reparée en la nature humaine. Et aussi il ne pouvoit estre autrement nostre Mediateur pour nous conjoindre à Dieu son Pere.

M.

Tu dis donc qu'il falloit que Jesus Christ fust homme pour accomplir l'office de Sanveur comme en nostre propre per∣sonne?

E.

Ouï, car il nous faut recouvrer en lui tout ce qui nous defaut en nous mesmes. Ce qui ne se peut autrement faire.

DIMANCHE VIII.
M.

POurquoi cela s'est-il fait par le Saint Esprit, & non point par oeuvre d'homme, felon l'ordre de la nature?

E.

Pource que la semence humaine est d'elle-mesme corrompuë, il falloit que la vertu du Saint Esprit entrevinst en cette conception, pour preserver nostre Seigneur de toute corruption, & le remplir de sain∣teté.

M.

Ainsi il nous est demontré que céelui qui doit sanctifier les autres est exempt de toute macule, & du ventre de sa mere est consacré à Dieu en pureté originelle, pour nestre point sujet à la corruption univer∣selle du genre humain?

E.

Je l'entens ainsi.

M.

Pourquoi de la nativité viens-tu incon∣tinent à la mort, laissant toute l'histoire de sa vie?

E.

Pource qu'il n'est ici parle que de ce qui est proprement de la substance de no∣stre redemption.

M.

Pourquoi n'est-il dit simplement en un mot, qu'il est mort: mais est parlé de Pon∣ce Pilate, sous lequel il a souffert?

E.

Cela n'est pas seulement pour nous as∣seurer de la certitude de l'histoire, mais aussi pour signifier que sa mort emporte condamnation.

M.

Comment cela?

E.

Il est mort pour souffrir la peine qui nous estoit deuë, & par ce moyen nous en de∣livrer. Or pource que nous estions coupa∣bles devant le jugement de Dieu comme malfaicteurs, pour representer nostre per∣sonne, il a voulu comparoistre devant le siege d'un Juge terrien, & estre con∣damné par la bouche d'icelui, pour nous absoudre au trône du Juge celeste.

M.

Neantmoins Pilate le prononce inno∣cent; & ainsi il ne le condamne pas com∣me s'il en estoit digne?

E.

Il y a l'un & l'autre: c'est qu'il est justifié par le témoignage du Juge, pour montrer qu'il ne soussre point pour ses de∣merites, mais pour les nostres: & cepen∣dant il est condamné solennellement par la sentence d'icelui mesme, pour denoter qu'il est vrayement nostre pleige, recevant la condamnation pour nous, afin de nous en acquitter.

M.

C'est bien dit. Car s'il estoit pecheur, $word$ ne seroit pas capable de souffrir la mort pour les autres: & neanmoins, afin que sa condamnation nous soit delivrance, il faut qu'il soit reputê entre les iniques.

E.

Je l'entens ainsi.

DIMANCHE IX.
M.

CE qu'il a esté crucifié emporte-t'il quelque chose de plus que si on l'eust autrement fait mourir?

E.

Ouï, comme l'Apostre le remontre, di∣sant, qu'il a esté pendu au bois pour trans∣porter nostre malediction sur soi-mesme pour nous en décharger. Car se genre de mort estoit maudit de Diéu.

M.

Comment? n'est-ce pas deshonorer le Seigneur. Jesus de dire qu'il a esté sujèt à malediction, mesme devant Dieu.

E.

Non: car en la recevant, il l'a aneantie par sa vertu: tellement qu'il n'a pas laiffé d'estre toûjours benit, pour nous remplit de sa benediction.

M.

Expose ce qui s'ensuit.

E.

D'autant que la mort estoit une male∣diction sur l'homme à cause du peché, Je∣sus Christ l'a endurée, & en l'endurant l'a vaincuë. Et pour demontrer que c'estoit une vraye mort que la sienne, il a voulù estre mis au sepulcre comme les autres hommes.

M.

Mais il ne semble pas qu'il nous revien∣ne quelque bien de cette victoire, veu que nous ne laifsons point de mourir?

E.

Cela n'empesche de rien. Car la mort des fideles n'est maintenant autre chose qu'un passage pour les introduire à une vie meilleure.

M.

De cela il s'ensuit qu'il ne nous faut plus craindre la mort comme une chose horrible, mais suivre volontairement no∣stre Chef & Capitaine Jesus Christ, qui nous y precede, non pas pour nous faire perir, mais pour nous sauver?

E.

Il est ainsi.

DIMANCHE X.
M.

QUe signifie ce qui est adjousté de sa descente aux enfers?

E.

C'est que non seulement il a soussert la mort naturelle, qui est la separation du corps & de l'ame: mais aussi que son ame a esté enserrée en angoisse merveilleufe, que saint Pierre appelle, Les douleurs de la mort.

M.

Pour quelle raison cela s'est-il fait, & comment?

E.

Pource qu'il se presente à Dieu pour sa∣tisfaire au nom des pecheurs, il falloit qu'il sentist cette horrible détresse en sa conscience, comme s'il estoit delaifsé de Dieu; & mesme comme si Dieu estoit courroucé contre lui. Estant en cette abys∣me, il a crié, Mon Dieu, mon Dieu, pour∣quoi m'as-tu laissé?

M.

Dieu estoit-il donc courroucé contre-lui?

E.

Non: mais il falloit toutefois qu'il l'af∣fligeast ainsi, pour verifier ce qui a esté predit par Esaye, Qu'il a esté frapé de la main du Pere pour nos pechez, & qu'il a porté nos iniquitez.

M.

Mais comment pouvoit-il estre en une telle frayeur comme s'il estoit abandonné de Dieu, lui qui est Dieu mesme?

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E.

Il saut entendre que felon sa nature hu∣maine il a esté en cette extremité: Et pour ce faire, que la Divinité se tenoit pour un peu de temps comme cachée, c'est à dire qu'elle ne demontroit point savertu.

M.

Mais comment se peut-il faire que Je∣sus Christ, qui est le salut du monde, ait esté en une telle condamnation?

E.

Il n'y a pas esté pour y demeurer. Car il a tellement senti cét horreur que nous, a∣vons dit, qu'il n'en a point essé oppressé, mais a bataillé contrè la puistànce des en∣fers pour la rompre & destruire.

M.

Par cela nous voyons la difference en∣tre le tourment qu'il a souffert, & celui que sentent les pecheurs que Dieu punit en son ire. Car ce qui a esté temporel en lui, est perpetuel. aux autres: & ce qui a esté seulement un aiguillon pour le poindre, leur est un glaive pour les navrer à mort.

E.

C'est cela: car Jesus Christ n'a pas laissé d'esperer tostjours en Dieu au milieu de telles détresses: mais les pecheurs que Dieu damne se desesperent & dépitent contre lui, jusques à le blasphemer.

DIMANCHE XI.
M.

POuvons-nous pas bien deduire de cela quel fruit nous recevons de la mort de Jesus Christ?

E.

Ouï bien. Et premierement nous vo∣yons que c'est un sacrifice par lequel il a satisfait pour nous au jugement de Dieu, & ainsi a appaisé l'ire de Dieu envers nous; & nous a reconciliez à lui. Pour le second, que son sang est le lavement par lequel nos ames ont esté purgées de toutes macules. Finalement, que par cette mort nos pe∣chez sont essacez, pour ne point venir en memoire devant Dieu: & ainsi que l'obli∣gation qui estoit contre nous est abolie.

M.

N'en avons-nous pas quelque autre u∣tilité?

E.

Si avons: c'est que si nous sommes vrais membres de Christ, nostre vieil hom∣me est crucifié, & nostre chair est morti∣fiće: afin que les mauvaises concupiscences ne regnent plus en nous.

M.

Declare moi l'article suivant.

E.

C'est que le troisiéme jour il est reffuscité. En quoi il s'est demontré vainqueur de la mort & du peché. Car par sa resurrecti∣on il a englouti la mort, & a rompu les liens du diable, & détruit toute sa puis∣sance.

M.

En combien de sortes nous profite cet∣te resurrection?

E.

La premiere est que la justice nous a e∣flé pleinement acquise en elle. La seconde, que ce nous est un certain gage que nous reffusciterons une fois en immortalité glo∣rieuse. La troisieme, qu$ si nous commu∣niquons vrayement à elle, nous reffuscitons dés a present en nouveauté de vie, pour servir à Dieu, & vivre saintement felon son bon plaisir.

DIMANCHE XII.
M.

POursuivons outre.

E.

Il monté au ciel.

M.

Est-il monté en telle sorte qu'il ne soit plus en la terre?

E.

Ouï, Cár puis qu'il a fait tout ce qui lui estoit enjoint du Pere, & qui estoit té∣quis à nostre salut, il n'estoit plus be$in qu'il conversalt au monde.

M.

Que nous profite cette Ascension?

E.

Le profit en est double. Car d'autan que Jesus Christ est entré $n cle$ en nostre nom, ainsi qu'il en estoit descendu pour nous, il nous y donne entrée, & nous a asseur$$ que la porte nous est maintenant ouverte, laquelle nous estoit close pour nos peche$, Secondeinent, il comparoist la devant la face du Pere, pour estre nostre Intercesteur & Adyocat.

M.

Mais Jesus Christ montant au ciel, s'est∣il tellement retiré du monde, qu'il ne soit plus, avec nous?

E.

Non: car il à dit le contraire: c'est qu'il sera prés de nous jusques à la fin?

M.

Est-ce de presence corporelle qu'il de∣meure avec nous?

E.

Non: car c'est autre chose de son corps qui a esté élevé en haut, & de sa vertu, la∣quelle est par tout épandue.

M.

Comment entens-tu qu'il est aslis à la dextre de Dieu son Pere?

E.

C'est qu'il a receu la seigneurie du ciel & de la terre, afin de regir & gouverner tout.

M.

Mais que sighifie la dextre, & cette assiette dont il est parlé?

E.

C'est une similitude tirée des Princes terriens, qui font seoit à leur costé dextre ceux qu'ils ordonnent Lieutenans pour gou∣verner en leur nom.

M.

Tu n'entens donc sinon ce que dit Saint Paul: c'est qu'il a esté constitué Chef de l'Eglise, & exalté deslus toute princi∣pauté, & qu'il a receu un nom pardessus tout nom?

E.

Voire.

DIMANCHE. XIII.
M.

POursui outre.

E.

De là il viendra juger les vivans & les morts: qui est à dire qu'il apparoistra une fois du ciel en jugement, ainsi qu'on l'y a veu monter.

M.

Puis que le jugement sera en la fin du∣siecle, comment dis tu que les uns vivront alors, & que les autres seront morts, $word$ qu'il est ordonné à tous hommes de mou∣rir une fois?

E.

Saint Paul répond à cette question, di∣sant, que ceux qui seront alors suryivans, se∣ront, subitement changez: afin que leut corruption soit abolie, & que leur corp$ soit renouvellé pour estre incorruptible.

M.

Tu entens donc que cette mutation leur sera comme une mort, pource qu'elle abolira leur premiere nature, pour les faire reffusciter en un autre estat?

E.

C'est cela.

M.

Nous revient-il quelque consolation d$ ce que Jesus Christ doit une fois venir $$|ger le monde?

E.

Ouï, singuliere. Car nous sommes cer∣tains qu'il n'apparoistra sinon en nostrefi∣lut.

M.

Nous ne devons donc pas craindrel derniér jugement pour l'avoir en borr$$

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E.

Non pas: puis qu'il ne nous faudra venir devant autre. Juge que celui mesme qui est nostre Advocat, & qui a pris nostre cause en main pour la defendre.

DIMANCHE XIV.
M.

VEnons a la troisléme partie.

E.

C'est la foi au Saint Esprit.

M.

A quoi nous profite elle?

E.

A ce que nous reconnoissions que com∣nie Dieu nous a rachetez & sauvez par Je∣sus Christ: aussi il nous fait par son Saint Esprit, participans de cette redemption & du salut.

M.

Comment cela?

E.

Comme le sang de lesus Christ est no stre lavement, aussi faut-il que le Saint Esprit en arrouse nos consciences, à ce qu'elles soient lavées.

M.

Il faut à ceci une declaration plus cer∣taine.

E.

C'est à dire que le saint Esprit habi∣tant en nos coeurs nous fait sentir la ver∣tu de nostre Seigneur Jesus. Car il nous il∣lumine, pour nous faire connoistre ses graces: il les seelles & imprime en nos ames, & leur donne lieu en nous: il nous regenere, & fait nouvelles creatures: tel∣lement que par son moyen nous recevons tous les biens & les dons qui nous sont of∣ferts en Jesus Christ.

DIMANCHE XV.
M.

QUe s'ensuit-il?

E.

La quatriémé partie, où il est dit que nous croyons l'Eglise Catholique.

M.

Qu'est ce que l'Eglise Catholique?

E.

C'est la compagnie des Fideles que Dieu a ordonnez & éleus à la vie eternelle.

M.

Est il necessaire de croire cét article?

E.

Ouï bien, si nous ne voulons faire la mort de Jesus Christ oisive, & tout ce qui a esté recité: car le fruit qui en procede est l'Eghse.

M.

Tu dis donc que jusques à cette heure $word$ a esté parlé de la cause & du fonde∣ment du salut, entant que Dieu nous a re∣ceus, en dilection par le moyen de Jesus Christ, & confirmé en nous cette grace parson S. Esprit: mais que maintenant est demontré l'esset & l'accomplissement de tout cela, pour en donner meilleure certi∣tude?

E.

Il est ainsi.

M.

En quel sens nommes-tu l'Eglise Sainte?

E.

Pource que ceux que Dieu a éleus, il les justifie & purifie a sa sainteté & inno∣cence, pour faire en eux reluire sa gloire. Et ainsi Jesus Christ ayant racheté son E∣glise, l'a sanctisiée: afin qu'elle fust glorieuse & sans macule.

M.

Que veut dire ce mot Catholique, ou Universelle?

E.

C'est pour signifier que comme il n'y a qu'un Chef des fideles, aussi tous doivent estre unis en un corps. Tellement qu'il n'y a pas plusieurs Eglises, mais une seule, la∣quelle est épandue par tout le monde.

M.

Et ce qui s'ensuit de la communion des Saints, qu'emporte t'il?

E.

Cela est adjousté pour mieux exprimer l'union qui est entre les membres de l'E∣glise. Et aussi par cela nous est donné à en∣tendre que, tout ce que nostre Seigneur fait de bien à son Eglise est pour le profit & salut de chacun fidele, pource que tous ont communion ensemble.

DIMANCHE XVI.
M.

MAis cette saintete que tu attribues a l'Eglise, est-elle maintenant par∣faite?

E.

Non pas cependant qu'elle bataille en ce monde. Car il y a toûjours des reliques d'imperfections, lesquelles ne seront jamais ostées, jusques à ce qu'elle soit pleinement conjointe à son Chef Jesus Christ, duquel elle est sanctifiée.

M.

Et cette Eglise ne se peut-elle autre∣ment connoistre qu'en la croyant?

E.

Il y a bien l'Eglise de Dieu visible, se∣lon qu'il nous a donné les, enseignes pour la connoistre, mais il est ici parlé propre∣ment de la compagnie de ceux que Dieu a élous pour les sauver, laquelle ne se peut pas pleinement voir à l'oeil.

M.

Que sensuit-il?

E.

Je croi la remission des pechez.

M.

Qu'entens-tu par ce mot de Remission?

E.

Que Dieu par sa bonté gratuite remet & quitte à ses fideles leurs fautes: telle∣ment qu'elles ne viennent point en conte devant son jugement pour les punir.

M.

De cela il s'ensuit que nous ne meritons pas satissaction que Dieu nous pardonne?

E.

Ouï. Car le Seigneur Jesus a fait lé paye∣ment, & en a porté la peine. De nostre part, nous ne pouvons apporter aucune recompense; mais il faut que nous rece∣vions par la pure liberalité de Dieu le par∣don de tous nos mé faits.

M.

Pourquoi mets-tu cét article apres l'E∣glise?

E.

Pource que nul n'obtient pardon de ses pechez, que premierement il ne soit incorporé au peuple de Dieu, & perseveré en unite & communion avec le corps de Christ, & ainsi qu'il soit membre de l'E∣glise.

M.

Ainsi, hors de l'Eglise, il n'y a que damnation & mort?

E.

Il est certain, car tous ceux qui se se∣parent de la communauté des fideles pour faire secte à part, ne doivent esperer salut cependant qu'ils sont en division.

DIMANCHE XVII.
M.

QUe s'ensuit-il?

E.

La resurrection de la chair, & la vie eternelle.

M.

Pourquoi cét article est-il mis?

E.

Pour nous montrer que nostre felicité ne gist pas en la terre: ce qui sert à double sin. Premierement, afin que nous appreni∣ons de passer par ce monde comme par un pais estrange, méprisant toutes les cho∣ses terriennes, & n'y mettans point nostre coeur: puis aussi que bien que nous n'apperce∣vions pas encore le fruit de la grace que le Seigneur nous a faite en Jesus Christ, nous ne perdions pas courage pourtant, mais l'attendions en patience jusques au temps de la revelation.

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M.

Comment se fera cette resurrection?

E.

Ceux qui seront morts auparavant re∣prendront leurs corps, neanmoins d'autre qualité, assavoir qu'ils ne seront plus su∣jets à mortalité & corruption, combien que ce sera la mesme substance, Et ceux qui survivront encore, Dieu les reffuscite∣ra miraculeusement par ce changement su∣bit dont il a eslé parlé.

M.

Et cette resurrection ne sera-t'elle pas commune tant aux mauvais comme aux bons?

E.

Ouï bien, mais ce sera bien en diverse condition. Car les uns reffusciteront à salut & joye: les autres à condamnation & mort.

M.

Pourquoi donc est il seulement parlé de la vie eternelle, & non point aussi bien de l'Enfer?

E.

Pource qu'il n'y a rien couché en ce sommaire qui n'appartienne proprement à la consolation des consciences fideles, il nous recite seulement les biens que Dieu fait à ses serviteurs. Et ainsi il n'y est fait nulle mention des iniques qui sont exclus de son Royaume.

DIMANCHE XVIII.
M.

PUis que nous avons le fondement sur lequel la foi est appuyée, nous pourrons bien de là conclurre que c'est que la vraye foi?

E.

Ouï: assavoir une certaine & ferme connolisance de la dilection de Dieu en∣vers nous, felon que parson Evangile il se declare estre nostre Pere & Sauveur par le moyen de Jesus Christ.

M.

La pouvons nous avoir de nous mesmes, ou si elle vient de Dieu?

E.

L'Ecriture nous enseigne que c'est un∣don singulier du S. Esprit: & l'experience aussi le montre.

M.

Comment?

E.

Purce que nostre entendement est trop debile pour comprendre la sagesse spi∣rituelle de Dieu, qui nous est revelée par $a foi: & nos coeurs sont enclins à defiance ou bien en fiance perverse de nous ou des creatures. Mais le Saint Esprit nous illu∣mine, pour nous faire capables d'entendre ce qui autrement nous seroit incompre∣hensible: & nous fortifie en certitude feelant & imprimant les promesses de salut en nos coeurs.

M.

Quel bien nous procede-t'il de cette foi quand nous l'avons?

E.

Elle nous iustifie devant Dieu, pour nous faire obtenir la vie eternelle.

M.

Comment donc? l'homme n'est-il pas justifié par les bonnes oeuvres, vivant sain∣tement & felon Dieu?

E.

S'il s'en trouvoit quelqu'un parfait, on le pourroit bien nommer juste: mais en∣tant que nous sommes tous pauvres pe∣cheurs il nous faut chercher ailleurs nostre dignité, pour répondre au jugement de Dieu.

DIMANCHE XIX.
M.

MAis toutes nos oeuvres sont-elles tellement reprouvées, qu'elles ne nous puissent meriter grace devant Dieu?

E.

Premierement toutes celles que nous fai∣sons de nostre propre nature sont vicieuses, & par consequent ne peuvent plaire à Dieu, mais il les condamne routes.

M.

Tu dis donc que devant que Dieu nous ait receus en sa grace, nous ne pouvons si∣non pecher: comme un mauvais arbre ne produit que de mauvais fruits?

E.

Il est ainsi$ car encore que nos oeuvres ayent belle apparence par dehors, si font∣elles mauvaises, puis que le coeur est per∣vers, lequel Dieu regarde.

M.

Par cela tu conclus que nous ne pou∣vons prevenir Dieu par nos merites pour l'induire à nous bien saire: mais au contraire, ne faisans que l'irriter contre nous?

E.

Ouï: & pourtant le dis que par sa pure misericorde & bonté, sans aucune, conside∣ration de nos oeuvres, il nous a agreables en Jesus Christ, nous imputant la justice d'icelui, & ne nous imputant point no$ fautes.

M.

Comment donc dis-tu que l'homme est justifié par $oi?

E.

Pource qu'en croyant & recevant en vraye fiance de coeur les promesses de l'Evangile, nous entrons en possession de cette justice.

M.

Tu entens que comme Dieu nous la presente par l'Evangile, aussi le moyen de la recevoir, c'est par soi?

E.

Ouï.

DIMANCHE XX.
M.

MAis puis que Dieu nous a une fois receus, les oeuvres que nous faisons par sa grace ne lui sont-elles pas plai∣sa$$tes?

E.

Ouï bien, entant qu'il les accepte li∣berulement, & non pas pour leur propre dignité.

M.

Comment ne sont elles pas digne d'e∣stre acceptées, puis qu'elles procedent du Saint, Esprit?

E.

Non pas: à cause qu'il y a toujours quelque infirmité de nostre chair melé$ parmi$ dont elles sont soiiillées.

M.

Quel sera donc le moyen de les ren∣dre agreables?

E.

Si elles sont faites en foi, c'est à dire, que là personne soit asseurce en sa consci∣ence que Dieu ne les examinera pas a la rigueur: mais en couvrant les imperfecti∣ons & macules par la pureté de Jesus Christ, les tiendra comme parfaites.

M.

Par cela dirons-nous que l'homme Chrestien est justisté par ses oeuvres apres que Dieu l'a appellé, ou que par elles il me∣rite que Dieu l'aime pour obtenir salut?

E.

Non: mais au contraire il est dit, Que nul homme, vivant ne sera justifié devant sa face. Pourtant nous avons à prier qu'il n'entre point en jugement, ni en conte avec nous.

M.

Tu n'entens pas pourtant que les bon∣nes oeuvres des fideles soient inutiles?

E.

Non: car Dieu promet de les remu∣nerer amplement, tant en ce monde comme en Paradis: mais tout cela pro∣cede de ce qu'il nous aime gratuitement, & ensevelit toutes nos fautes pour n'en a∣voir point de memoire.

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M.

Mais pouvons-nous croire pour estre ju∣stifiez, sans faire de bonnes oeuvres?

E.

Il est impossible: car croire en Jesus Christ, c'est le recevoir tel qu'il se donne à nous. Or il nous promet nonseulement de nous delivrer de la mort, & rementtre en la grace de Dieu son Pere par le merite de son innocence: mais aussi de nous regenerer par son Esprit pour nous faire vivre sainctement.

M.

La foi donc non seulement ne nous rend pas nonchalans à bonnes oeuvrés: mais est la racine d'où elles sont produites?

E.

Il est ainsi: & pour cette cause la doctrine de l'Evangile est comprise en ces deux poincts, assavoir la foi & la Repentance.

DIMANCHE XXI.
M.

QU'est-ce que la Repentance?

E.

C'est une déplaisance du mal, & amour du bien, procedant de la crainte de Dieu, & nousinduisant à mortifier nostre chair, pour estre gouvernez & conduits par le Saint Esprit au service de Dieu.

M.

C'est le second poinct que nous avons touché de la vie Chrestienne?

E.

Ouï: & nous avons dit que le vrai & legitime service de Dieu consiste en ce que nous obeïslions à sa volonté.

M.

Pourquoi?

E.

Dautant qu'il ne veut pas estre servi felon nostre fantaisie, mais, à son plaisir.

M.

Quelle regle nous a-t'il donnée pour nous gouverner?

E.

Sa Loi.

M.

Quest ce qu'elle contient?

E.

Elle est divisée en deux parties, dont la premiere contient quatre. commandemens, & l'autre six: ainsi en tout ce sont dix.

M.

Qui a fait cette division?

E.

Dieu mesme, qui l'a donnée écrite à Moyse en deux Tables, & a dit qu'elle se reduisoit en dix paroles.

M.

Quel est l'argument de la premiere Table?

E.

Touchant la maniere de bien honorer Dieu.

M.

Et de la seconde?

E.

Comme il nous saut vivre avec nos pro∣chains, & de ce que nous leur devons.

DIMANCHE XXII.
M.

REcite le premiere commande∣ment.

E.

EScoute Israël, Je suis l'Eternel ton Dieu, qui t'ai retire du païs d'Egypte, de, la maison de servi$ude. Tu n'$uras point d'au$res dieux devant ma face.

M.

Expose le sens.

E.

Du commencement il fait comme une presace sur toute la Loi, car il s'attribuë au∣thorité de commander, se nommant l'Eter∣nel, & Createur du monde. Apres il se dit nostre Dieu, pour nous rendre sa doctrine amiable. Car s'il est nostre Sauuveur, c'est bien la raison que nous lui soyons peuple obeïssant.

M.

Mais ce qu'il dit apres de la delivrance de la terre d'Egypte, ne s'adresse-t'il pas particulierement au peuple d'Israël?

E.

Si fait bien felon le corps: mais il nous appartient aussi generalement à tous entant qu'il a delivré nos ames de la captivité spiri∣tuelle du peché, & de la tyrannie du diable.

M.

Pourquoi fait-il mention de cela au commencement desa Loi?

E.

C'est pour nous admonester combien nous sommes tenus de suivre son bon plaisir, & quelle ingratitude ce seroit de faire le contraire.

M.

Et qu'est-ce qu'il requiert en somme en cé premier commandement?

E.

Que nous lui reservions à lui seul l'hon∣neur qui lui appartient, sans le transporter ailleurs.

M.

Quel honneur est-ce qui lui est propre?

E.

De l'adorer lui seul, l'invoquer, avoir nostre fiance en lui: & telles choses sembla∣bles qui sont attribuées à fa Majesté.

M.

Pourquoi dit il, Devant ma face?

E.

Daiitant qu'il voit & connoist tout, & est iuge des secrettes pensées des hommes, il signifie que non seulement par confesli∣on exterieure il veut estre avoiié Dieu, mais aussi en pure verité, & affection de coeur.

DIMANCHE XXIII.
M.

DI le second commandement.

E.

Tu ne le feras Image taillée, n'y ressemblance aucune des choses qui sont là baut és Cieux, ni ci-bas en la Terre, ni és eaux dessous la Terre. Tu ne te prosterneras point devant elles, & neles serviras point.

M.

Veut-il du tout desendre de faire au∣cune image?

E.

Non: mais il defend de faire aucune image, ou pour figurer Dieu, ou pour adorer.

M.

Pourquoi est-ce qu'il n'est point licite de representer Dieu visiblement?

E.

Pource qu'il n'y a nulle convenance entre lui qui est esprit, eternel & incom∣prehensible, & une matiere corporelle∣morte, corruptible & visible.

M.

Tu entens donc que c'est faire dethon∣neur à sa Majesté de le vouloir represonter, ainsi?

E.

Ouï.

M.

Quelle forme d'adoration est ici con∣damnée.

E.

C'est de se presenter devant une image pour faire son oraison: de flechir le genoiiil devant elle, ou faire quelque autre signe de reverence, comme si Dieu se demontroit la à nous.

M.

Il ne nous faut pas donc entendre que toute taillure ou peinture soit defe iduë en general, mais seulement toutes images qui se font pour servir Dieu ou l'honorer en choses visibles, ou bien pour en abuser à idolatrie en quelque sorte que ce soit?

E.

Il est ainsi.

M.

A quelle sin reduirons-no$s ce com∣mandement?

E.

Comme au premier Dieu a declaré qu'il estoit seul sans autre qu'on doit adorer: aussi maintenánt il nous demontre quelle est la droite forme, afin de nous retirer $ toutes superstitions & façons charnelles.

DIMANCHE XXIV.
M.

PAssons outre.

E.

Il adiouste une menace, Qu'il est l'Eternel nosire Dieu, fort, jaloux, visitant l'iniquité des peres sur les enfans, en la troisié∣me & quatriéme generation, envers ceux qui le haïssent.

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M.

Pourquoi fait-il mention de sa force?

E. Pour denoter qu'il est puiflant à main∣tenir sa gloire.

M.

Que signifie-t'il par la jalousie?

E.

Qu'il ne peut endurer de compagnon. Car comme il s'est donné à nous par la bonté infinie, aussi veut-il que nous soyons entierement siens. Et c'est la chasteté de nos ames, d'estre consacrées & dediées a lui. D'autre part, c'est une paillàrdise spirituelle, de nous détourner à quelque superstition.

M.

Comment se doit-il entendre, Qu'il punit le peché des peres sur les enfans?

E.

Pour nous donner plus grande crainte, il dit, que non seulement il se vengera de ceux qui l'offensent, mais aussi que leur lignée sera maudite apres eux.

M.

Et cela n'est il point contraire à la justice de Dieu, de punir les uns pour les autres?

E.

Si nous considerons quelle est la con∣dition de l'humain lignage, cette question sera vuidée. Car denature nous sommes tous maudits, & ne nous pouvons plaindre de Dieu, quand il nous laisséra comme nous sommes. Or comme il remontre sa grace & dilection sur ses serviteurs, en beniffant leurs enfans: aussi c'est un témoignage de sa vengeance sur les iniques, quand il laisse leur semence en malediction.

M.

Que dit-il plus?

E.

Afin denous inciter aussi par douceur, il dit, Qu'il fait misericorde en mille generati∣ons āceux qui l'aiment & gardent ses comman∣demens.

M.

Entend-il que l'obeïssance du fidele sauvera toute sa race, encore qu'elle soit méchante?

E.

Non pas: mais qu'il étendra jusques∣là sa bonté envers ses fideles, que pour l'amour d'eux il se donnera à connoistre à leurs enfans: & non seulement les fera prosperer felon la chair, mais les sanctifiera par son Saint Esprit, pour les rendre o∣beïssans à sa volonté.

M.

Mais cela n'est pas perpetuel?

E.

Non: car comme le Seigneur se reserve la liberté de faire misericorde aux enfans des iniques: aussi d'autre part, il retient le pouvoir d'élire ou rejetter en la genera∣tion des fideles ceux que bon lui semble. Toutefois il le fait tellement qu'on peut connoistre cette promefse n'estre pas vaine ni frustratoire.

M.

Pourquoi nomme-t'il ici mille genera∣rations, & en la menace n'en nomme que trois ou quatre?

E.

C'est pour signifier que son propre est d'user pliitost de bonté & douceur, que de rigueur ni rudesse, comme il témoigne qu'il lest enclin à bien faire, & tardif à se courroucer.

DIMANCHE XXV.
M.

VEnons au troisiéme commande∣ment.

E.

Tu ne prendras point le Nom de l'Eternel ton Dieu en vain.

M.

Que veut-il dire?

E.

Il nous defend d'abuser du Nom de Dieu, non seulement en parjures, mais aussi on sermens superflus & oisifs.

M.

En peut-on donc bien user en sermens?

E.

Ouï, qui sont necefsaires: c'est à die, pour maintenir la verité quand il en est besoin, & pour entretenir charité & con∣córde entre nous.

M.

Ne veut-il sinon corriger les sermens q$ sont au deshonneur de Dieu?

E.

Par une espece il nous instruit en gene∣ral de ne mettre jamais en avant le Nom de Dieu, sinon en crainte & humilité pour le glorifier. Car felon qu'il est saint & digne, aussi nous faut-il garder de le pren∣dre en telle sorte, qu'il semble que nous l'ayons en mépris, ou que nous donnions occasion de le deshonorer.

M.

Comment cela se fera-t'il?

E.

Quand nous ne penserons ni ne parle∣rons de Dieu ni de ses oeuvres, sinon hono∣rablement & à sa loiiange.

M.

Que s'ensuit-il?

E.

Une menace, Qu'il ne tiendra point pour innocent celui qui aura pris son Nom en vain.

M.

Veu qu'il denonce ailleurs generalement qu'il punira tous transgresseurs, qu'est-ce qu'il y a ici davantage?

E.

Par cela il a voulu declarer combien il a en singuliere recommandation la gloire de son Nom, disant nommément qu'il ne souffrira pas qu'on le méprise, afin que nous soyons tant plus soigneux de l'avoir en re∣verence.

DIMANCHE XXVI.
M.

VEnons au quatriemé.

E.

Aye souvenance du jour du repos pour le sanctifier. Six jours tu travailleras, & feras toute ton oeuvre: mais le septiéme jour est le repos de l'Eternel ton Dieu. Tu ne feras aucu∣ne oeuvre en icelui, toi, ni ton fils, ni ta fiue, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton beflail, ni ton estranger qui est dedans tes portes. Car en six jours l'Eternel a fait les cieux & la terre, & la mer, & tout ce qui est en eurs, & s'est reposé au septiéme jour: & pourtant l'Eternel a benit le jour du repos, & l'a sanctifi$.

M.

Commande-t'il de travailler six jours la semaine, pour se reposer le septiéme?

E.

Non pas simplement: mais en donnant congé de travailler six jours durant, il re∣serve le septiéme, auquel il n'est pas permis de travailler.

M.

Nous defend il donc tout ouvrage un jour la semaine?

E.

Ce commandement a quelque conside∣ration particuliere. Car l'observation du repos est une partie des ceremonies de la Loi ancienne. C'est pourquoi à la venue de Jésus Christ elle à esté abolie.

M.

Dis-tu que ce commandement appar∣tient proprement aux Juifs, & a esté donné pour le temps de l'ancien testament?

E.

Ouï, entant qu'il est ceremonial.

M.

Comment donc? y-a-t'il quelque chose outre la ceremonie?

E.

Il a esté fait pour trois raisons.

M.

Quelles sont-elles?

E, Pour figurer le repos spirituel, pour la police Ecclesiastique, & pour le soulage∣ment des serviteurs.

M.

Qu'est-ce que le repos spirituel?

Page [unnumbered]

E.

C'est de cesser de nos propres oeuvres, afin que le Seigneur oeuvre en nous.

M.

Comment cela se fait-il?

E.

En mortisiant nostre chair, c'est à dire, renonçant à nostre nature, afin que Dieu nous gouverne par son Esprit.

M.

Cela se doit-il faire seulement un jour la semaine?

E.

Il se doit faire continuellement: car depuis que nous avons commencé, il nous faut poursuivre toute nostre vie.

M Pourquoi donc y a-t'il un certain jour assigné pour figurer cela?

E.

Il n'est pas requis que la figure soit du tout pareille à la verité: mais il susfit qu'il y ait quelque semblance.

M.

Pourquoi le septiéme jour est-il ordonné plûtost qu'un autre?

E.

Le nombre de sept signifie perfection en l'Ecriture. Ainsi il est propre pour denoter la perpetuité. Aussi il nous ad∣moneste que nostre repos spirituel n'est si∣non commencé durant cette vie presente, & ne sera point parfait jusques à ce que nous fortions de ce monde.

DIMANCHE XXVII.
M.

MAis que veut dire la raison qu'al∣legue ici nostre Seigneur, qu'il nous faut reposer comme il a fait?

E.

Apres avoir creé toutes ses oeuvres en six jours, il a dedié le septiéme à la consi∣dération d'icelles. Et pour nous mieux conduire à ce faire, il nous allegue son exemple. Car il n'y a rien tant desirable, que d'estre conforme à lui.

M.

Faut-il toûjours mediter les oeuvres de Dieu, où s'il susfit un jour la semaine?

E.

Cela se doit faire chacun jour: mais à cause de nostre infirmité, il y a un cer∣tain specialement deputé. Et c'est la po∣lice que j'ai dite.

M.

Quel ordre donc doit-on garder en ce jour?

E.

C'est que le peuple s'assemble pour estre instruit en la verité de Dieu, pour faire les prieres communes: & rendre té∣moignage de sa foi & religion.

M.

Comment entens-tu que ce commande∣ment est donné aussi pour le soulagement des serviteurs?

E.

Pour donner quelque relasche à ceux qui sont en la puissance d'autrui. Et pareil∣lement cela sert à la police commune. Car chacun s'accoustume à travailler le reste du temps, quand il y a un jour de repos.

M.

Maintenant, disons comment ce com∣mandement s'adresse à nous.

E.

Touchant-la ceremonie, elle est abolie. Car nous avons l'accomplissement en Jesus Christ.

M.

Comment?

E.

C'est que nostre vieil homme est cru|$ifié par là vertu de sa mort: & que par sa resurrection nous reffuscitons en nou∣veauté de vie.

M.

Qu'est-ce donc qui nous en reste?

E.

Que nous observions l'ordre institué en l'Eglise, pour ouïr la parole du Seigneur, communiquer aux prieres publiques & aux Sacremens: & que nous ne contrevenions pas à la police spirituelle qui est entre les fideles.

M.

Et la figure ne nous profite-t'elle de rien?

E.

Si fait bien: car il nous la saut re∣duire à la verité: c'est qu'estans vrais membres de Christ, nous delaislions nos oeuvres propres, pour nous permettre à son gouvernment.

DIMANCHE XXVIII.
M.

VEnons à la seconde Table.

E.

Honore ton pere & ta mere.

M.

Qu'entens-tu par honorer?

E.

Que les enfans soient humbles & obeïs∣sans à leurs peres & meres, leur portent honneur & reverence: les aslistent, & soient à leur commandement, comme iss y sont tenus.

M.

Poursui plus outre.

E.

Dieu adjouste une promesse à ce com∣mandement, disant, Afin que tes jours soient prolongez sur la terre, laquelle l'Eter∣nel ton Dieu te donne.

M.

Que veut dire cela?

E.

Que Dieu donnera lougue vie à ceux qui rendront au pere & à la mere l'hon∣neur qui leur est deu.

M.

Veu que cette vie est si pleine de mi∣seres, comment est-ce que Dieu promet à l'homme pour une grace qu'il le fera vivre longuement?

E.

La vie terrienne: quelque miserable qu'elle soit, est une benediction de Dieu à l'homme sidele: & ne fust-ce sinon d'au∣tant que Dieu lui testifie sa dilection pa∣ternelle, l'entretenant en icelle.

M.

S'ensuit-il au contraire, que l'homme qui meurt-tost soit maudit de Dieu?

E.

Non. Et mesmes il aviendra quelque∣fois que le Seigneur retirera plûtost de ce monde ceux qu'il aimera le plus.

M.

En ce faisant, comment garde-t'il sa promesse?

E.

Tout ce que Dieu nous promet de biens terriens, il nous le faut prendre avec condi∣tion, entant qu'il est expedient pour nostre salut spirituel. Car ce seroit une pauvre chose si cela n'alloit toûjours devant.

M.

Et de ceux qui sont rebelles à pere & à mere?

E.

Non seulement Dieu les punira au jour du jugement, mais il en fera aussi la ven∣geance sur leurs corps, soit en les faisant mourrir devant leurs jours, ou ignominieu∣sement, ou en quelque autre sorte.

M.

Parle-t'il pas nommément de la terre de Canaan en cette promesse?

E.

Ouï bien quant aux enfans d'Israël: mais il nous faut maintenant prendre ce mot plus generalement: Car en quelque païs que nous demeurions, puis que la terre est sienne, il nous y donne nostre habitation.

M.

Est-ce là tout le commandement?

E.

Combien qu'il ne soit parlé que de pere & de mere: toutefois il faut entendre tout superieur, puis qu'il y a une mesme raison.

M.

Et quelle?

E.

C'est que Dieu leur a donné la preé∣minence: car il n'y a authorité ni de peres, ni de princes, ni de tous autres superieurs, sinon comme Dieu l'a ordonné.

Page [unnumbered]

DIMANCHE XXIX.
M.

DI le sixiéme commandement.

E.

Tu ne tuëras point.

M.

Ne defend-il sinon d'estre meurtrier?

E Si fait bien: car puis que c'est Dieu qui parle, non seulement il nous impose loi sur les oeuvres exterieures, mais principalement sur les affections de nostre coeur.

M.

Tu entens donc qu'il y a une espece de meurtre interieur que Dieu nous defend ici?

E.

Ouï, qui est haine & rancune, & desir de mal faire à nostre prochain.

M.

Suffit-il de ne point haïr, & ne point porter mauvaise affection?

E.

Non: car Dieu en condamnant la haine, signifie qu'il requiert que nous aimions nos prochains, & procurions leur salut, & le tout de vraye affection & sans feintise.

M.

Di le septiéme commandement.

E.

Tu nè paillarder as point.

M.

Quelle est la somme?

E.

Que toute paillardise est maudite de Dieu: & pourtant qu'il nous en faut abstenir, si nous ne voulons provoquer son ire contre nous.

M.

Ne requiert-il autre chose?

E.

Il nous faut toûjours regarder la nature du Legislateur, lequel ne s'arreste pas seu∣lement à l'oeuvre exterieure, mais deman∣de l'affection du coeur.

M.

Qu'est-ce donc qu'il emporte?

E.

Puis que nos corps & nos ames sont temples du Saint Esprit, que nous les con∣servions en toute honnesteté. Etainsi, que nous soyons chastes, non seulement de fait, mais aussi de desirs, de paroles & de gestes, tellement qu'il n'y ait nulle partie en nous soiiillée d'impudicité.

DIMANCHE XXX.
M.

VEnons au huitiéme commande∣ment.

E.

Tu ne déroberas point.

M.

Veut-il seulement defendre les larcins qu'on punit par Justice, ou s'il s'estend plus loin?

E.

Il entend toutes mauvaises trafiques & moyens déraisonnables d'attirer à nous le bien de nostre prochain, soit par violence ou cautelle, ou en quelque autre sorte que Dieu n'ait point approuvée.

M.

Est-ce affez de s'abstenir du fait, ou si le vouloir y est aussi compris?

E.

Il faut toûjonrs revenir là: d'autant que le Legislateur est spirituel, qu'il ne parle pas simplement des larcins exterieurs mais aussi bien des enterprises, volontez, & deliberations de nous enrichir au détriment de nostre prochain.

M.

Que faut-il donc?

E.

Faire nostre devoir de conserver à un chacun le sien.

M.

Quel est le neufiéme?

E.

Tu ne diras point faux témoignage contre ton prochain.

M.

Nousdefend-il de nous parjurer en juge∣ment, ou du tout de mentir contre nostre prochain?

E.

En nommant une espece il baille une doctrine generale, que nous ne médisions pas faussement contre nostre prochain, & que par nos detractions & mensonges no$s ne le blessions point en ses biens ni en $word$ renommée.

M.

Pourquoi notamment parle-t'il de parjures publics.

E.

Pour nous faire avoir en plus grande horreur ce vice de médire & détracter, denotant que quiconque s'accoustume à faustement calomnier & diffamer son pro∣chain, viendra bien puis apres à se perjurer en jugement.

M.

Ne defend-il sinon de mal parler, ou s'il comprend aussi mal penser?

E.

L'un & l'autre, felon la raison dessus al∣leguée. Car ce qui est mauvais de faire devant les hommes, est mauvais de vouloir devant Dieu.

M.

Recite donc-ce qu'il veut dire ensomme.

E.

Il nous enseigne de n'estre pas enclins à mal juger ni detracter, mais plûtost à bien estimer de nos prochains, tant que la ve∣rité le porte, & conserver leur bonne re∣nommée en nos paroles.

DIMANCHE XXXI.
M.

VEnons au dernier commandement.

E.

Tu ne convoitèras point la maison de ton prochain: tu ne convoiter as point la femme dè ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son boeuf, ni son asne, ni aucune chose qui soit à ton prochain.

M.

Veu que toute la Loi est spirituelle, comme tu as dit, & que les autres com∣mandemens ne sont pas seulement pour regler les oeuvres exterieures, mais aussi les affections du coeur, qu'est-ce qui est ici dit davantage?

E.

Le Seigneur a voulu par les autres com∣mandemens ranger nos affections & volon∣tez, ici il veut aussi imposer loi à nos pen∣sées, lesquelles emportent quelque convoi∣tise & desir, & toutesfois ne viennent pas lusques à un vouloir arresté.

M.

Entens-tu que la moindre tentation qui pourroit venir en pensée à l'homme fidele soit peche, encore qu'il y resiste & n'y consente nullement?

E.

Il est certain que toutes pensées mauvai∣ses procedent de l'infirmité de nostre chair, encore que le consentement n'y soit pas: mais je dis que ce commandement parle des concupiscences qui chatoiiillent & poi∣gnent le coeur de l'homme, sans venir jus∣ques au p$opos deliberé.

M.

Tu dis donc que comme les affections mauváises, qui emportent une volonté cer∣tainè & comme resoluë, ont esté ci-dessus condamnées: aussi que maintenant le Sei∣gneur requiert une telle integrité, qu'il n'entre en nos coeurs quélque mauvaise cu∣pidité, pour les solliciter & émouvoir à mal?

E.

C'est cela.

M.

Ne pouvons-nous pas maintenant faire un sommaire de toute la Loi?

E.

Si faisons, la reduisans ä deux articles: dont le premier est, Que nous ajmions nostre Dieu de tout nostre coeur, de toute nostre ame, & de toutes nos force. Item, nostre prochain comme nous-mesmes.

M.

Qu'est-ce qu'emporte I'amour de Dieu?

E.

Si nous l'aimons comme Dieu, c'est pour

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avoir & tenir comme Seigneur, Maistre, auveur, & Pere: ce qui requiert crainte, conneur, fiance, obeïssance avec l'amour.

M.

Que signifie, De tout nostre, coeur, nostre $$me, & nos forces?

E.

C'est à dire, d'un tel zele, & d'une telle $ehentence, qu'il n'y ait en nous nul desir, $nulle volonté, nulle estude, nulle cogitation, $word$ qui contrevienne à cét amour.

DIMANCHE XXXII.
M.

QUel est le sens du second article?

E.

C'est que comme nous sommes si enclins naturellement à nous aimer, que cette affection surmonte toutes les autres$ aussi que la charité de nos prochains domi∣ne tellement en nos coeurs, qu'elle nous niene & conduise, & soit la regle de toutes nos pensées & nos oeuvres.

M.

Et qu'entens-tu par nos prochains?

E.

Non seulement nos parens & amis, ou oeux qui ont accointance avec nous: mais aussi oeux que nous ne connoissons pas, & mesmes nos ennemis.

M.

Quelle conjonction ont-ils avec nous?

E.

Telle que Dieu a mife entre tous les hommes de la terre, laquelle est inviolable: & ainsi ne se peut abolir par la malice de personne.

M.

Tu dis donc que si quelqu'un nous hait, cela est de son propre: mais cependant, que felon l'ordre de Dieu il ne laisse point d'estre nostre prochain, & nous le faut te∣nir pour tel?

E.

Ouï.

M.

Puis que la Loi contient la forme de bien servir Dieu. l'homme Chrestien ne doit-il pas vivre felon qu'elle commande?

E.

Si fait bien: mais il y a une telle infir∣mité en tous, que nul ne s'en acquite par∣faitement.

M.

Pourquoi donc requiert le Seigneur une telle perfection, qui est pardessus nostre fa∣culté?

E.

Il ne requiert rien à quoi nous ne so∣yons tenus. Au reste, moyennant que nous mettions peine de conformer nostre vie a cè qui nous y est dit, encore que nous so∣yons bien loin d'atteindre jusques á la perfe∣ction, le Seigneur ne nous impute point ce qui defaut.

M.

Parles-tu en general de tous hommes, ou seulement des fideles?

E.

L'homme qui n'est point regeneré de l'Esprit de Dieu ne pourroit commencer à faire le moindre poinct qui y soit. Davan∣tage, encore qu'il s'en trouvast un qui en fist quelque partie, si ne seroit-il pas quitte pourtant: car nostre Seigneur denonce que tous ceux qui ne parferont entierement le contenu d'icelle, seront maudits.

DIMANCHE XXXIII.
M.

PAr cela il faut conclurre que la Loi a double office, felon qu'il y a deux especes d'hommes?

E.

Ouï: car envers les incredules elle ne sert sinon de les redarguer, & rendre plus inexcusables devant Dieu: & c'est ce que dit Saint Paul, qu'elle est ministere de more & damnation. Envers les fideles elle a bien un autre usage.

M.

Quel?

E.

Premierement, d'autant qu'elle leur demontre qu'ils ne se peuvent justifier par leurs oeuvres, en les humiliant elle les dis∣pose à chercher leur salut en Jesus Christ. Puis apres, entant qu'elle requiert plus qu'il ne leur est possible de faire, elle les admo∣neste de prier le Seigneur qu'il leur donne la force & le pouvoir, & cependant de se reconnoistre toûjours coupables, afin de ne s'en orgueillir point. Tiercement, elle leur est comme une bride pour les retenir en la crainte de Dieu.

M.

Nous dirons donc, que combien que durant cette vie mortelle nous n'accom∣plissions jamais la Loi: toutesfois ce n'est pas chose superfluë, qu'elle requiert de nous une telle perfection. Car elle nous montre le but où nous devons tendre, afin qu'un chacun de nous, selon la grace que Dieu lui a faite, s'essorce assiduellement d'y tendre, & s'avancer de jour en jour.

E.

Je l'entens ainsi.

M.

En la Loi n'avons nous pas une regle parfaite de tout bien?

E.

Si: tellement que Dieu ne demande sinon que nous la suivions: au contraire desavouë & reiette tout ce que l'homme entreprend de faire outre le contenn d'i∣celle: car il ne demande autre sacrifice qu'obeïssance.

M.

Dequoi servent donc toutes les admo∣nitions, remontrances, commandemens, & exhortations que font tant les Prophetes que les Apostres?

E.

Ce ne sont que pures declarations d'i∣celle, qui ne sont pas pour nous détourner de son obeïssance, mais plûtost pour nous y conduire.

M.

Et toutesfois ne traite-t'elle pas des vo∣cations particulieres?

E.

Quand elle dit qu'il faut rendre à chacun ce qui lui appartient, de cela nous pouvons bien conclurre quel est le devoir de nostre? estat chacun en son endroit. Et puis, nous avons (comme dit a esté) l'exposition par toute l'Ecriture. Car ce que le Seigneur a ici couché en somme, il le traite ci & là pour plus ample instruction.

DIMANCHE XXXIV.
M.

PUis que nous avons suffisamment parlé du service de Dieu, qui est la seconde partie de l'honorer, parlons de la troisiéme.

E.

Nous avons dit que c'est de l'invoquer en toutes nos necessitez.

M.

Entens-tu qu'il le faille invoquer seul?

E.

Ouï: car il demande cela comme un honneur propre à sa Divinite.

M.

Si ainsi est: en quelle sorte nous est-il loisible de requerir les hommes à nostre aide?

E.

Ce sont choses bien differentes: car nous invoquons Dieu pour protester que nous n'attendons aucun bien que de lui, & que nous n'avons ailleurs recours, cependant nous cherchons l'aide des hommes, entant qu'il nous le permet, & leur donne le pou∣voir & le moyen de nous aider.

M.

Tu entens que ce que nous demandons secours des hommes ne contrevient pas à

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ce que nous devons invoquer un seul Dieu veu que nous ne mettons pas nostre fiance en eux, & ne les cherchons sinon entant que Dieu les a ordonnez ministres & dispensa∣teurs de ses biens pour nous en subvenir?

E.

Il est vrai: & de fait, tout ce qui nous en vient de bien, il nous le faut prendre comme de Dieu mesme, ainsi qu'à lá veri∣té il le nous envoye par leurs mains.

M.

Et ne nous faut-il pas neanmoins recon∣noistre envers les hommes le bien qu'ils nous font?

E.

Si fait bien: & ne fust-ce que pource que Dieu leur fait cét honneur de nous commu∣niquer sès biens par leurs mains: car en ce faisant il nous oblige à eux, & veut que nous leur soyons attenus.

M.

De cela pouvons-nous pas bien conclurre qu'il n'est licité d'invoquer Anges ni Saints qui sont decedez de ce monde?

E.

Ouï bien: car des Saints, Dieu ne leur a pas attribué cét office de nous aider & subvenir. Touchant les Anges, combien qu'il les employe pour servir à nostre salut, toute∣fois si ne veut-il pas que nous les invoquions, ni que nous ayons nostre adresse à eux.

M.

Tu dis donc que tout ce qui ne convient pas à l'ordre que le Seigneur a mis, contre∣vient à sa volonté?

E.

Ouï: car si nous ne nous contentons de ce que le Seigneur nous donne, cela est un signe certain d'infidelité. Davantage, si au lieu d'avoir nostre refuge à Dieu seul, sui∣vant son commandement nous recourons a eux, mettans en eux quelque partie de nostre fiance, c'est idolatrie, entant que nous leur transferons ce que Dieu s'estoit reservé.

DIMANCHE XXXV.
M.

DIsons maintenant de la maniere de prier Dieu. Suffit-il le faire de langue ou si l'esprit & le coeur y est requis?

E.

La langue n'y est pas toûjours necessaire$ mais il faut qu'il y ait intelligence & affe∣ction.

M.

Comment le prouveras-tu?

E.

Puis que Dieu est Esprit, il demande toûjours le coeur, & singulierement en l'o∣raison, où il est question de communiquer avec lui: pourtant il ne promet d'estre pro∣chain sinon à ceux qui l'invoqueront en verité: au contraite il maudit tous ceux qui le font par hypocrisie & sans affection.

M.

Toutes prieres donc faites seulement de bouche sont superfluës?

E.

Non seulement superfluës, mais aussi dé∣plaisantes à Dieu.

M.

Quelle affection doit estre en la priere?

E.

Premierement que nous sentions nostre misere & pauvreté, & que ce seutiment cause en nous une fascherie & angoisse: puis que nous avons un desir vehement d'obtenir grace devant Dieu, lequel desi∣enflamme nos coeurs, & engendre en nou$ une ardeur de prier.

M.

Cela procede-t'il de nostre nature ou de la grace de Dieu?

E.

Il faut que Dieu y travaille: car nous sommes trop stupides: mais l'Esprit de Dieu nous incite à gemissemens inenarrables, & forme en nos coeurs telle affection & tel zele que Dieu demande, comme dit Saint Paul.

M.

Est-ce à dire que nous ne devions p$s nous inciter & foliciter a prier Dieu?

E.

Non: mais au contraire, afin que quand nous ne sentons pas en nous telle dispositi∣on, nous supplions le Seigneur qu'il l'y mette, pour nous rendre capables & pro∣pre de le prier deuement.

M.

Tu n'entens pas toutefois que la langue soit du ront inutile en prieres?

E.

Non pas: car quelque fois elle aide l'es∣prit, & le retient, le fortifiant, à ce qu'il ne se destourne pas si tost de Dieu. Davantage, puis qu'elle est formée pour glorifier Dieu par dessus tous les autres membres, c'est bien raison, qu'elle s'y employe en toutes sortes: & aussi le zele du coeur, par son ar∣deur & vehemence, contraint souvent la langue sans qu'on y pense.

M.

Si ainsi est, qu'est-ce de prier en langue inconnue?

E.

C'est une moquerie de Dieu, & une hy∣pocrisie perverse.

DIMANCHE XXXVI.
M.

QUand nous prions Dieu, est-ce à l'adventure, ne sçachans point si nous profiterons ou non, on bien si nous devons estre certains que nos prieres so∣yent exaucées?

E.

Il nous faut toûjours avoir ce sondement en nos prieres, qu'elles seront receues de Dieu, & que nous obtiendrons ce que nous requerons entant qu'il sera expedient. Et pourtant Saint Paul dit, que, la droite in∣vocation procede de la foi. Car si nous n'a∣vons fiance en la bonte de Dieu, il nous est impossible de l'invoquer en verité.

M.

Et que sera-ce de ceux qui doutent, & ne scavent si Dieu les écoute ou non?

E.

Leurs prieres sont du tout frivoles, d'au∣tant qu'elles n'ont nulles promefles: caril est dit que nous demandions en croyant, & qu'il nous sera ottroyé.

M.

Il reste de scavoir comment & à quel titre nous pouvons avoir la hardiesse de nous presenter devant Dieu, veu que nous en sommes par trop indignes?

E.

Premierement, nous avons les promesses unsquelles il nous faut arrester, sans consi∣derer nostre dignité, Secondement, si nous sommes enfans de Dieu, il nous induit & pousse par son Saint Esprit à nous retirer familierement à lui comme à nostre Pere. Et afin que nous ne craignions pas de com∣paroistre devant sá Majesté glorieuse, nous qui ne sommes que pauvres vers de terre, & miserables pecheurs; il nous donne nostre Seigneur Jesus pour Mectiateur, afin que par son moyen ayans accez, nous ne doutions point de trouver grace.

M.

Enters-tu qu'il ne nous faille invoquer Dieu qu'au Nom de Jesus Christ?

E.

Je l'entens ainsi: car nous en avons le $ommandement exprés. Et en ce faisant, il nous est promis que par la vertu de son in∣tercession nos requestes nous serontottroyées.

M.

Ce n'est point donc temerite, ni fole presomption, de nous oser adresfer prive∣ment à Dieu, moyennant que nous ayons

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Jesus Christ pour nostre Advocat, & que nous le mettions en avant, afin que Dieu par, son moyen nous ait agreables, & nous exauce?

E.

Non: car nous prions comme par sa bouche, d'autaut qu'il nous donne entreé & audiance, & intercede pour nous.

DIMANCHE XXXVII.
M.

PArlons maintenant de la substance de nos oraisons. Pouvons-nous de∣mander tout ce qui nous vient en l'entende∣ment, ou s'il y a quelque certaine regle là dessus?

E.

Si nous suivions nostre fantaisie, nos orai∣sons seroient bien mal reglées. Car nous sommes si ignorans, que nons ne pouvons pas juger ce qui est bon de demander, aulli nos desirs sont si desordonnez, qu'il est bien necèffaire que nous ne leur laschions point la bride:

M.

Que faut-il donc?

E.

Que Dieu mesme nous enseigne selon qu'il connoist estre expedient, & quasi, qu'il nous conduise par la main, & que nous ne fassions que suivre.

M.

Quelle instruction nous a-t'il baillée?

E.

Par toute l'Ecriture il nous l'a baillée tres-ample: majs afin de nous mieux adres∣ser a un certain but, il a donné un formu∣laire auquel il a briévement compris tous les poincts qu'il nous est licite & expedient de demander.

M.

Recite-le.

E.

C'est que nostre Seigneur Jesus estant requis de ses Disciples qu'il les enseignast à prier, leur répond qu'ils auront à dire ainsi.

NOstre Pere qui es és Cieux: Ton Nom soit sanctifié. Ton regne vienne. Ta volonté soit faite en la terre comme au ciel. Donne nous a$jouril hui nostre pain quotidien. Et nous par∣do$ne nos offences, commie nous pardonnons à ceux qui nous ont offencez. Et ne nous indui point en tentation, mais delivre nous du malin. Car à toi est le regne, la puissance, & la gloire, és siecles des siccles. Amen.

M.

Pour plus facile intelligence, di-moi combien d'articles elle contient?

E.

Six: dont les trois premiers regàrdent la gloire de Dieu sans quelque conside∣ration de nous-mesmes: les autres sont pour nous, & concernent nostre bien & profit.

M.

Comment donc? faut-il demander quel∣que chose à Dieu dont il ne nous revienne nulle utilité?

E.

Il est vrai que par sa bonté infinie il dispose & ordonne tellement toutes choses, que rien ne peut estre à la gloire de son Nom, qui ne nous soit mesmes salutaire. Ainsi quand son Nom est sanctifié, il nous tourne cela en sanctification: quand son regne advient, nous en sommes aucunement participans. Mais en desirant & deman∣dant ces choses, il nous faut avoir seulement egard a son honneur, sans penser à nous au∣cunement, ni chercher nostre profit.

M.

Selon ton dire, ces trois premieres re∣questes nous sont bien utiles: mais il ne l$s faut faire à autre intention, sinon pour de∣sirer que Dieu soit glorifié?

E.

Ouï: semblablement, encore que les trois dernieres soient deputées à desirer ce qui nous est expedient, toutefois la gloire de Dieu nous doit estre en icelles recom∣mandée, tellement que ce soit la fin de tous nos desirs.

DIMANCHE XXXVIII.
M.

VEnons à l'exposition. Et devant qu'entrer plus avant, pourquoi Dien est-il ici appellé nostre Pere, plûtost qu'autrement?

E.

D'autant qu'il est bien requis que nos consciences soient fermement asseurées, quand il est question de prier: nostre Dieu se nomme d'un mot qui n'emporte que douceur & gracieuseté, pour nous oster toute doute & perplexité, & nous donner hardieffe de venir privement à lui.

M.

Oserons-nous bien donc nous retirer familierement a Dieu, comme un enfant à son pere?

E.

Ouï: voire avec plus grande certitude d'obtenir ce que nous demanderons. Car si nous, qui sommes mauvais ne pouvons refuler à nos enfans le pain & la viande quand ils nous la demandent: tant moins le fera nostre Pere celeste, qui non seule∣ment est bon, mais est la souveraine bonté.

M.

De ce nom mesme ne pouvons-nous pas bien prouver ce qui a esté dit, que la priere doit estre fondée en l'intercession de Jesus Christ?

E.

Ouï pour certain, d'autant que Dieu ne nous avouë pour ses enfans, sinon en∣tant que nous sommes membres de son Fils.

M.

Pourquoi n'appelles-tu pas Dieu ton Pere, mais l'appelles nostre en commun?

E.

Chaque fidele le peut bien nommer sien en particulier: mais en ce formulaire Je∣sus Christ nous enseigne de prier en com∣mun, pour nous admonester que nous de∣vons exercer nostre charité envers nos procháins en priant, & non pas seulement avoir soin de nous.

M.

Que veut dire cette particule, Qui es és Cieux?

E.

C'est autant comme si je l'appellois, Haut, Puissant, Incomprehensible.

M.

Comment cela, & pour quelle fin?

E.

Afin qu'en l'invoquant nous apprenions d'élever en haut nos pensées, pour ne rien imaginer de lui charnel ni terrien, & ne le point mesurer à nostre apprehension, ni l'assujettir à nostre volonté, mais adorer en humilité sa Majeste glorieuse, & aussi pour avoir plus certaine fiance en lui, en∣tant qu'il est gouverneur & maistre de tout.

DIMANCHE XXXIX.
M.

EXpose maintenant la premiere de∣mande.

E.

Le Nom de Dieu, c'est sa renommée, de laquelle il est celebré entre les hommes: nous desirons donc que sa gloire soit exal∣tée par tout & en toutes choses.

M.

Entens-tu qu'elle puisse croistre ou di∣minuer?

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E.

Non pas en soi-mesme, mais c'est à dire qu'elle soit manifestée comme elle doit, & quelque chose que Dieu fasse, que toutes ses oeuvres apparoissent glorieuses comme elles sont: tellement qu'en tou∣tes sortes il soit glorifié.

M.

En la seconde requeste qu'entens-tu par le regne de Dieu?

M.

Il consiste principalement en deux poincts: c'est de conduire les siens, & les gouverner par son Esprit: au contraire d'abysimer & confondre les reprouvez, qui ne se veulent rendre sujets à sa donsina∣tion, afin que clairement il apparoisse qu'il n'y a nulle puissance qui puisse re∣sister à la sienne.

M.

Comment pries-tu que ce regne vienne?

E.

C'est que de jour en jour le Seigneur multiplie le nombre de ses fideles: qu'il augmente de jour en jour ses graces sur eux, jusques à ce qu'il les ait du tout remplis: qu'il éclaircisse aussi de plus en plus sa ve∣rité: qu'il manifeste sa justice, dont Sa∣tan & les tenebres de son regne soient confondus: & que toute iniquite soit de∣struite & abolie.

M.

Cela ne se fait-il pas dés-à-apresent?

E.

Si fait bien en partie: mais nous desi∣rons que continuellement il croisse & soit avance, jusques à ce qu'il vienne finalement à sa perfection, qui sera au jour du juge∣ment, auquel Dieu sera exalté seul, & toute creature sera humiliée sous sa grandeur, mesmes il sera tout en toutes choses.

DIMANCHE. XL.
M.

COmment requiers-tu que la volonté de Dieu soit faite?

E.

Que toutes creatures lui soient sujettes pour lui rendre obeïssance: & ainsi que tout se fasse selon son bon plaisir.

M.

Entens-tu que rien se puisse faire con∣tre sa volonté?

E.

Nous requerons non pas seulement qu'il amene toutes choses a tel poinct, que cè qu'il a determiné en son conseil ad∣vienne: mais que toute rebellion abbatuë, il range toutes volontez à la sienne seule.

M.

En ce faisant, ne renonçons-nous pas à nos propres volontez?

E.

Si faisons, & non seulement afin qu'il renverse nos desirs qui contrevien∣nent à son bon plaisir, les rendans vains & de nul effet: mais aussi qu'il crée en nous nouveaux esprits & nouveaux coeurs: tellement que nous ne vueillions rien de nous-mesmes: mais que son Esprit vueille en nous, pour nous faire pleinement con∣sentir avec lui.

M.

Pourquoi adjoustes-tu, En la terre comme au ciel?

E.

D'autant que ses creatures celestes, qui sont ses Anges, ne cherchent qu'à lui o∣beir paisiblement sans nulle contrarieté, nous desirons que le semblable se fasse en la terre: c'est que tous hommes se ran∣gent en obeïssance volontaire.

DIMANCHE XLI.
M.

VEnons à la seconde partie. Qu'en∣tens-tu par le pain quotidien que tu demandes?

E.

Generalement tout ce qui fait beso$$ à l'indigence de hostre corps, non se$ le∣ment quant à la nourriture & ves$$e, mais tout ce que Dieu connoist nous e$$e expedient à ce que nous puislions mang$ nostre pain en paix.

M.

Comment demandes-tu à Dieu q$$$ te donne ta nourriture, veu qu'il no$ commande de la gagner au travail de no$ mains?

E.

Combien qu'il nous faille travaillet pour vivre, toutefois nostre labeur, indu∣strie, & diligence ne nous nourrit pas mais la seule benediction de Dieu, laquelle est sur nos mains, & sur nostre labeur, pour le faire prosperer. Et davantage, il nous faut entendre que ce ne sont pas les viandes qui nous nourrissent, encores que nous les ayons à commandement: mais la vertu du Seigneur, qui use d'elles com∣me d'instrument tant seulement.

M.

Pourquoi l'appelles-tu tien, puis que tu demandes qu'il te soit donné?

E.

C'est par la bonté de Dieu qu'il est fait nostre, encore qu'il ne nous soit point deu. Et aussi par cela nous sommes avertis de ne point desirer le pain d'autrui, mais celui que nous aurons acquis par mo∣yen legitime, selon l'ordonnance de Diéu.

M.

Pourquoi dis-tu quotidien & aujour∣d'hui?

E.

Cela est pour nous apprendre d'a∣voir contentement, & ne point appeter plus que nostre necessité requiert.

M.

Veu que cette priere est commune à tous, comment les riches qui ont provision & abondance de biens pour long-temps, peuvent-ils demander pour un jour?

E.

Il faut que tant riches que pauvres en∣tendent que tout ce qu'ils ont ne leur peut de rien profiter, sinon entant que le Sei∣gneur leur en donne l'usage, & fait par sa grace qu'il nous soit profitable. Ainsi en ayant, nous n'avons rien, sinon d'autant qu'il le nous donne.

DIMANCHE XLII.
M.

QUe contient la cinquiéme deman∣de?

E.

Qu'il plaise à Dieu nous pardonner nos pechez.

M.

N'y a-t'il homme vivant si juste qui n'ait besoin de la faire?

E.

Non: car le Seigneur Jesus a donné cette forme à ses Apostres pour son Eglise. Ainsi quiconque s'en vondroit exempter re∣nonceroit à la communauté des Chrestiens. Et de fait l'Ecriture nous testifie, que le plus parfait voulant alleguer un poinct à Dieu pour se justifier, sera trouvé coupable en mille. Il faut donc que nous ayons tout nostre refuge à sa misericorde.

M.

Comment entens-tu que cette remis∣sion nous soit faite?

E.

Comme les paroles mesmes dont Jesus Christ a usé le montrent: c'est que les pe∣chez sont des dettes, lesquelles nous tien∣nent obligez à condamnation de mon eternelle: nous demandons que Dieu nous en acquite par sa pure liberalité.

M.

Tu entens donc que nous obtenons re∣mission

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de nos pechez par la bonté gratui∣te de Dieu?

E.

Ouï: car nous ne pouvons nullement satissaire pour la moindre faute que nous ayons commise, si Dieu n'use envers nous de sa pure liberalité, en nous les remet∣tant toutes.

M.

Quand Dieu nous a pardonné nos pe∣chez, quel fruit & utilité nous en revient-il?

E.

Par ce moyen nous lui sommes a∣greables, comme si nous estions justes & innocens: & nos consciences sont asseurées de sa dilection paternelle euvers nous, dont nous vient salut & vie.

M.

Quand tu demandes qu'il nous par∣donne comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensez, entens-tu qu'en par∣donnant aux hommes nous meritions par∣don de lui?

E.

Non pas: car le pardon ne seroit plus gratuit, & ne seroit pas fondé en la satis∣faction qui a esté en la mort de Jesus Christ, comme il doit estre. Mais entant qu'en oubliant les injures que l'on nous fait, nous ensuivons sa douceur & clemence, & ainsi nous demonstrons estre ses enfans: il nous donne cette enseigne pour nous certifier. Et d'autre part il nous signifie qu'il ne nous faut attendre en son jugement que toute severité & extréme rigueur, si nous ne sommes faciles à pardonner & faire grace à ceux qui sont coupables envers nous.

M.

Tu entens donc que Dieu desavouë ici pour ses enfans tous ceux qui ne peuvent oublier les offenses qu'on leur fait, afin qu'ils ne s'attendent pas d'estre partici∣pans de cette grace?

E.

Ouï: & que tous sçachent qu'à la mesme mesure qu'ils auront fait à leurs pro∣chains, il leur sera rendu.

DIMANCHE XLIII.
M.

QU'est-ce qui s'ensuit?

E.

Ne nous indui point en tentation: mais nous delivre du malin.

M.

Ne fais-tu qu'une requeste de cela?

E.

Non: car le second membre est l'ex∣position du premier.

M.

Quelle est la substance d'icelle?

E.

Que Dieu ne nous laisse point trébu∣cher au mal, & ne permette que nous so∣yons vaincus du diable, & des mauvaises concupiscences de nostre chair, lesquelles bataillent contre nous: mais qu'il nous don∣ne la force de resister, nous soustenant de sa main, & nous ayant en sa sauvegarde pour nous defendre & conduire.

M.

Comment cela se fait-il?

E.

Quand par son Esprit il nous gouverne, pour nous faire aimer le bien, & haïr le mal: suivre sa justice, & faïr le peché. Car par la vertu du Saint Esprit nous sur∣montons le diable, le peché, & la chair.

M.

Cela est-il necess$ire à tous?

E.

Ouï. Car le diable veille toûjours sur nous comme un lion rugissant prest à nous devorer: & nous sommes si foibles & fra∣giles, qu'il nous auroit incontinent abba∣tus, si Dieu ne nous fortifioit pour on avoir la victoire.

M.

Que signifie le mot de Tentation?

E.

Les astuces & tromperies du diable. dont il use pour nous surprendre, selon que nostre sens naturel est enclin à estre deceu & nous decevoir: & nostre volonté est plûtost preste de s'adonner au mal qu'au bien.

M.

Mais pourquoi demandes-tu à Dieu qu'il ne t'induise point au mal, veu que ce∣la est le propre office du diable?

E.

Comme Dieu par sa misericorde con∣serve ses fideles, & ne permet que le diable les seduise, ni que le peché les sur∣monte: aussi ceux qu'il veut punir, non seulement il les abandonne & retire sa grace d'eux, mais aussi les livre au diable, pour estre sujets à sa tyrannie: les aveu∣gle, & les met en sens reprouvé.

M.

Que veut dire cette addition, Car à toi est le regne, la puissance, & la gloire aux siecles des siecles?

E.

Pour nous reduire derechef en memoi∣re que nos oraisons sont plsitost fondées e$ Dieu & en sa puissance & bonté, que non pas en nous, qui ne sommes pas dignes d'ouvrir la bouche pour le requerir. Et. aussi pour nous apprendre de clorre toutes nos prieres par sa loiiange.

DIMANCHE XLIV.
M.

N'Est-il licite de demander autre chose, sinon ce qui a esté recité?

E.

Combien qu'il nous soit libre d'uset d'autres paroles & d'autre forme & ma∣niere, si est-ce que nulle oraison ne sera jamais agreable à Dieu, lequelle nese rap∣porte à celle-ci comme à la regle unique de bien prier.

M.

Il est temps de venir au quatriéme membre de l'honneur que nous devons rendre à Dieu.

E.

Nous avons dit que c'est de le recon∣noistre de coeur & consesser de bouche au∣theur de tout bien pour le glorifier.

M.

Nous a-t il pas donné quelque regle pour ce faire?

E.

Toutes les loiianges & actions de gra∣ces contenuës en l'Ecriture, nous doivent estre pour regle & enseignement.

M.

N'en a-t'il $ien touche en l'Oraison?

E.

Si a bien: Car en desirant que son Nom soit sanctifié, nous desirons que tou∣tes ses oeuvres apparoissent glorieuses, com∣me elles sont: tellement que, soit qu'il pu∣nisse, il soit tenu pour juste: soit qu'il par∣donne, pour miseri$$rdieux: soit qu'il ac∣complisse ses pr$messes, pour veritable. En somme, qu'il n'y ait du tout rien en quoi sa gloire ne reluise. Cela est lui attribuer la loiiange de tous biens.

M.

Que oeonclurrons-nous de tout ce que nous avons dit?

E.

Ce que t$moigne la verité, & qui a est$ touché au commencement, assavoir, Que cette est la vie eternelle, de connoistre le vrai Dieu, & ceh$$ qu'il a envoyé Jesus Christ $le connoistre, dis-je, pour l'hono∣rer deuëment, afin qu'il nous soit non seu∣lement Maistre & Séigneur, mais aussi Pe∣re & Sauveur: & que nous mutuellement lui soyons enfans, serviteurs, & peuple de∣dié à sa gloire.

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DIMANCHE XLV.
M.

QUel est le moyen de parvenir à un tel bien?

E.

Pour ce faire il nous a laissé sa sainte Parole, laquelle nous est comme une entrée en son Royaume celeste.

M.

Où prens-tu cette Parole?

E.

Comme elle nous est comprise aux saintes Ecritures.

M.

Comment faut-il que nous en usions pour en àvoir du profit?

E.

En la recevant en pleine certitude de conscience, comme une verité procedée du ciel, nous soûmettant à elle en droite obeïs∣sance, l'aimant de vraye affection & en∣tiere, l'ayant imprimée en nos coeurs pour la suivre & nous conformer à icelle.

M.

Tout cela est-il en nostre puissance?

E.

Il n'y en a du tout rien: mais c'est Dieu qui travaille en nous en telle sorte, par son Saint Esprit.

M.

Mais ne faut-il pas que nous mettions peine & diligence à ouïr & lire la doctri ne laquelle nous y est montree?

E.

Ouï bien. Et premierement, que chacun en son particulier y travaille: & sur tout, que nous frequentions les predications, aus∣quelles cette Parole est exposée en l'assem∣blée des Chrestiens.

M.

Entens-tu qu'il ne suffit pas de lire en sa maison, sinon que tous ensemble oyent une doctrine commune?

E.

Je l'ontens ainsi, cependant que Dieu en donne le moyen.

M.

La raison?

E.

Pource que Jesus Christ a establi cét or∣dre en son Eglise, non pas pour deux ni pour trois, mais pour tous generalement: & a de∣claréque c'est le seul moyen de l'edifier & en∣tretenir. Ainsi, il nous faut là tous ranger, & n'estre pas plus sages que nostre Maistre.

M.

Est ce donc chose necessaire qu'il y ait des Pasteurs?

M.

Ouï, & qu'on les écoute, recevant en numilité la doctrine du Seigneur par leur bouche. Tellement que quiconque les mé prise & refuse de les ouïr, il rejette Jesus Christ, & se separe de la compagnie des fideles.

M.

Mais suffit-il d'avoir une fois esté instruit par eux, ou s'il faut continuer?

E.

Ce n'est rien de commencer si on ne poursuit & persevere toûjours. Car jusques a la fin il nous convient estre toûjours eco∣liers de Jesus Christ. Et il a ordonné les Ministres Ecclesiastiques pour nous ensei∣gner en son Nom.

DIMANCHE XLVI.
M.

N'Y a-il point d'autre moyen outre la Parole, par lequel Dieu se communique à nous?

E.

Il conjoint les Sacremens avec la pre∣dication de sa Parole.

M.

Qu'est-ce que Sacrement?

E.

C'est un temoignage exterieur de la grace de Dieu, qui par un signe visible nous represente les choses spirituelles, afin d'imprimer plus fort en nos coeurs les pro∣messes de Dieu, & nous en rendre plus certiins.

M.

Comment? un signe visible & mate∣riel a-t'il cette vertu de certifier la con∣science?

E.

Non pas de soi-mesme, mais entant qu'il est ordonné de Dieu à cette fin.

M.

Veu que c'est le propre office du Saint Esprit de seeller les promesses de Dieu en nos coeurs, comment attribuës tu cela aux Sacremens?

E.

Il y a grande difference entre l'un & l'autre. Car l'Esprit de Deu à la verité est celui seul qui peut toucher & émouvoir nos coeurs, illuminer nos entendemens, & assu∣rer nos consciences, tellement que tout cela doit estre Jugé son oeuvre propre, pour lui en rendre loiiange. Cependant le Sei∣gneur s'aide des Sacremens comme d'in∣strumens inferieurs, selon que bon lui sem∣ble, sans que la vertu de son Esprit en soit aucunement amoindrie.

M.

Tu entens donc que l'essicace des Sa∣cremens ne gist pas en l'element exterieur, mais procede toute de l'Esprit de Dieu?

E.

Ouï, selon que Dieu veut travailler par les moyens qu'il a instituez sans deroger à sa puissance.

M.

Et qui meut Dieu de faire cela?

E.

Pour le soulagement de nostre infirmité. Car si nous estions de nature spirituelle comme les Anges, nous pourrions contem∣pler spirituellement & lui & ses graces: mais ainsi que nous sommes enveloppez de nos corps, nous avons besoin qu'il use de fi∣gures envers nous, pour nous representer les choses spirituelles & celestes: car autre∣ment nous ne les pourrions comprendre. Et aussi il nous est expedient que tous nos sens soient exercez en en ses saintes pro∣messes, pour nous confirmer en elles.

DIMANCHE XLVII.
M.

PUis que Dieu a introduit les Sa∣cremens pour nostre necessité, ce seroit orgueil & presomption de penser qu'on s'en peust passer?

E.

Ouï pour certain: tellement que qui∣conque s'abstient volontairement de l'usa∣ge, pensant qu'il n'en a point de besoin, méprise Jesus Christ, rejette sa grace, & esteint son Saint Esprit.

M.

Mais qu$$le certitude de grace peuvent donner les Sacremens, veu que bons & mauvais les recoivent?

E.

Combien que les incredules & méchans aneantiffent la grace qui leur est presentée par les Sacremens, si ne s'ensuit-il pas que la proprieté d'iceux ne soit telle.

M.

Comment donc, & quand est-ce que les Sacremens produisent leur effet?

E.

Quand on les recoit en foi, cherchant seulement Jesus Christ & sa grace.

M.

Pourquoi dis-tu que nous y devons chercher Jesus Christ?

E.

Pour signifier qu'il ne nous faut pas amuser au signe terrien pour chercher là nostre salut: & ne nous faut pas imagi∣ner qu'il y ait là quelque vertu enclose: mais au contraire, que nous prenions le signe pour une aide qui nous conduise droitement au Seigneur Jesus, pour cher∣cher en lui salut & tout bien.

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M.

Veu que la foi y est requise, comment dis-tu qu'ils nous sont donnez pour nous confirmer en la foi, nous asseurant des pro∣messes de Dieu?

E.

Il ne suffit pas que la foi soit seulement commencée en nous pour une fois, mais il faut qu'elle soit nourrie & entretenuë: puis qu'elle croisse journellement & soit aug∣mentée en nous. Pour la nourrir donc, pour la fortifier & l'accroistre, Dieu nous donne les Sacremens. Ce que Saint Paul denoté, en disant que leur usage est de seeller les promesses de Dieu en nos coeurs.

M.

Mais n'est - ce pas signe d'infidelité quand les promesses de Dieu ne nous sont pas assez fermes d'elles-mesmes sans aide?

E.

C'est signe de petitesse & infirmité, de foi, laquelle est bien aux enfans de Dieu, qui ne $a$ssent pas pourtant d'estre fideles, mais ce n'est pas encore en perfection: car cependant que nous vivons en ce monde, il y a toûjours quelques reliques de defi∣ance en nostre chair, & pourtant nous saut-il toûjours profiter & croistre.

DIMANCHE XLVIII.
M.

COmbien y a-t'il de Sacremens, en l'Eglise Chrestienne?

E.

Il n'y en a que deux communs que le Seigneur Jesus ait instituez pour toute la compagnie des fideles.

M.

Quels?

E.

Le Baptesme & la Sainte Cene.

M.

Quelle convenance & difference y a-t'il de l'un à l'autre?

E.

Le Baptesme nous est comme une en∣trée en l'Eglise de Dieu. Car il nous testifie que Dieu, au lieu que nous estions étrangers de lui, nous reçoit pour ses domestiques. La Cene nous est un témoignage que Dieu nous veut nourrir & repaistre, comme un bon pere de famille a le soin de nourrir & refectionner ceux de sa maison.

M.

Pour avoir plus claire intelligence de l'on & de l'autre, disons de chacun à part. Premierement, quelle est la signification du Baptesme?

E.

Elle à deux parties: car le Seigneur nous y represente la remission de nos pe∣chez: & puis nostre regeneration ou re∣nouvellement spirituel.

DIMANCHE XLIX.
M.

QUelle similitude a l'e$u avec ces choses pour les representer?

E.

Pource que la remission des pechez est une espece de lavement par lequel nos ames sont purgées de leurs macules, ain∣si que les ordures du corps sont net∣toyées par l'eau.

M.

Touchant l'autre partie?

E.

Pource que le commencement de no∣stre regeneration est que nôtre nature soit mortifiée: l'issuë, que nous soyons nouvelles creatures par l'Esorit de Dieu. L'eau donc nous est mise sur la teste en signe de mort: toutesfois en telle forte, que la resurrection nous est semblablement figu∣rée, en ce que cela se fait seulement pour une minute de temps, & non pas pour nous noyer en l'eau.

M.

Tu n'entens pas que l'eau soit le lave∣ment de nos ames?

E.

Non pas: car cela appartient au sang de Jesus Christ seulement, qui a esté é∣pandu pour essacer toutes nos soiiillures, & nous rendre purs & impollus devant Dieu. Ce qui est accompli en nous quand nos consciences en sont arrousées par le Saint Esprit. Mais par le Sacrement ce - la nous est certifié.

M.

Entens-tu que l'eau nous en soit seule∣ment une figure?

E.

C'est tellement une figure, que la ve∣rité est conjointe avec: car Dieu ne nous promet rien en vain: c'est pourquoi il est certain qu'au Baptesme la remission des pechez nous est offerte & nous la rece∣vons.

M.

Cette grace est-elle accomplie indif∣fèremment en tous?

E.

Non: car plusieurs l'aneantiffent par leur perversité. Neantmoins le Sacrement ne laisse pas d'avoir une telle nature, combien qu'il n'y ait que les fideles qui en sentent l'efficace.

M.

La regeneration d'où prend-elle sa vertu?

E.

De la mort & resurrection de Christ: car sa mort a cette vertu, que par elle nostre vieil Adam est crucifié, & nostre nature vicieuse est comme ensevelie pour n'avoir plus vigueur de regner. Et la nou∣veauté de vie, pour suivre la justice de Dieu, procede de la resurrection.

M.

Comment certe grace nous est-elle ap∣pliquée au Baptesme?

E.

Entant que nous sommes là vestus de Jesus Christ, & y recevons son Esprit, mo∣yennant que nous ne nous rendions pas in∣dignes des promesses qui nous y sont don∣nées.

DIMANCHE L.
M.

DE nostre costé, quel est le droit usage du Baptesme?

E.

Il gist en foi & en repentance: c'est que nous soyons certains d'avoir nostre pu∣reté spirituelle en Christ: & sentions en nous & declarions à nos prochains par oeuvres, que l'Esprit d'icelui habite en nous pour mortifier nos propres desirs, afin de nous faire suivre la volonté de Dieu.

M.

Puis que cela y est requis, comment est∣ce qu'on baptize les petits enfans?

E.

Il n'est pas dit que la foi & la repen∣tance doivent toûjours preceder la recep∣tion du Sacrement: mais seulement cela doit estre en ceux qui en sont capables. Il sussit donc que les petits enfans produi∣sent, & demontrent le fruit de leur Bap∣tesme apres estre venus en âge de connois∣sance.

M.

Comment montreras tu qu'il n'y a point d'inconvenient en cela?

E.

Pource que la Circoncision estoit aussi bien Sacrement de penitence, comme Moyse & les Prophetes declarent: & Sacrement de foi comme dit Saint Paul. Et toutefois Dieu n'en a point exclus les petits enfans.

M.

Mais pourras-tu bien montrer qu'il y

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ait une mesme raison de les recevoir au Baptesme comme à la Circoncision?

E.

Ouï bien: car les promesses que Dieu avoit anciennement faites à son peuple d'Israël, sont maintenant étenduës par tout lemonde.

M.

Mais s'ensuit-t'il de cela que nous de∣vions user de signe?

E.

Il est ainsi, quand le tout sera bien con∣sideré. Car Jefus Christ ne nous a pas faits participans de la grace qui avoit au∣paravant esté au peuple d'Israel, pour l'a∣moindrir en nous, ou la rendre plus obscure qu'elle n'estoit: mais plsitost l'a éclaircie & augmentée davantage.

M.

Entens-tu que si nous ne donnions le Baptesme aux petits enfans, la grace de Dieu seroit amoindrie par la venuë du Seigneur Jesus?

E.

Ouï bien: car le signe de la bonté & misericorde de Dieu sur nos enfans, qu'ont en les anciens, nous defaudroit: lequel sert grandement à nostre consolation, & à con∣firmer la promesse qui a esté faite dés le commencement.

M.

Tu entens donc, puis que Dieu se de∣clarant anciennement estre Sauveur des petits ensans, a voulu cette promesse estre seellée en leurs corps par Sacrement exte∣rieur, que c'est bien la raison qu'il n'y ait pas moins de confirmation depuis la venuë de Christ, veu que la mesme promesse de∣aneure, & mesmes est plus clairement testi∣fiée de parole, & ratifiée de fait?

E.

Ouï: & davantage, puis que c'est chose notoire que la vertu & la substance du Baptesme appartient aux petits enfans, on $eur feroit injure de leur dénier le signe qui est inferieur.

M.

A quelle condition donc devons-nous baptifer les petits enfans?

E.

En signe & témoignage qu'ils sont he∣ritiers de la benediction de Dieu promise à la generation des fideles: afin qu'estans venus en âge ils reconnoissent la verité de leur Baptesme, pour en faire leur profit.

DIMANCHE LI.
M.

DIsons de la Cene. Et premierement, quelle est la signification d'icelle?

E.

Nostre Seigneur l'a instituée pour nous affeurer que par la communication de son corps & de son sang nos ames sont nourries en l'esperance de la vie eternelle.

M.

Pourquoi est-ce que le Seigneur par le pain nous represente son corps, & par le $in son sang?

E.

Pour signifier que telle proprieté qu'a le pain envers nos corps, c'est de les re∣paistre & substanter en cette vie mortelle: aussi a son corps envers nos ames, c'est de $es nourrir & vivifier spirituellement. Pa∣reillement, que comme le vin fortifie, re∣fectione, & réjouït l'homme selon le corps: aussi que son sang est nostre joye, nostre re∣fection & vertu spirituelle.

M.

Entens-tu qu'il nous faille communiquer vrayement au corps & au sang du Seigneur?

E.

Je l'entens ainsi. Car puis que toute la fiance de nostre falut gist en l'obeïflance qu'il a renduë à Dieu son Pere, entant qu'elle nous est imputée comme sielle estoit nostre, il faut que nous le possedions, veu que ses biens ne sont pas nostres, sinon $word$ premierement il se donne à nous.

M.

Mais ne s'est-il pas donné a nous quan$ il s'est exposé à la mort pour nous recor∣cilier à Dieu son Pere, & nous delivr$$ de damnation?

E.

Si est bien: mais il ne suffit pas de cela, sinon que nous le recevions, pour sen∣tir en nous le fruit & l'efficace de sa mort & passion.

M.

La maniere de le recevoir, est-ce point par foi?

E.

Ouï, nonseulement en croyant qu'il est mort & reffuscité pour nous delivrer de la mort eternelle, & nous acquerir la vie: mais aussi qu'il habite en nous, & est con∣joint avec nous en telle union que le chef avec ses membres, afin de nous faire par∣ticipans de toutes ses graces en vertu de cette conjonction.

DIMANCHE LII.
M.

CEtte communion ne se fait-elle sinon en la Cene?

E.

Si fait bien: car nous l'avons par la predication de l'Evangile, comme dit S. Paul, entant que le Seigneur Jesus nous y promet que nous sommes os de ses os, & chair de sa chair: qu'il est le pain de vie qui est descendu du Ciel pour nourrir nos ames: que nous sommes un avec lui com∣me il est un avec son Pere: & telles choses.

M.

Qu'est-ce que nous avons au Sacrement davantage, & de quoi nous sert-il plus?

E.

C'est que cette communion est plus am∣plement confirmée en nous, & comme ratifiée, combien que Jesus Christ nous soit vrayement communiqué & par le Baptes∣me & par l'Evangile: toutefois ce n'est qu'en partie, non pas pleinement.

M.

Qu'est-ce donc en somme que nous avons par le signe du pain?

E.

C'est que le corps du Seigneur Jesus en∣tant qu'il a une fois esté offert en sacrifice pour nous reconcilier à Dieu, nous est main∣tenant donné, pour nous certifier que nous avons part en cette reconcilliation.

M.

Qu'est-ce que nous avons au signe du vin?

E.

Que le Seigneur Jesus nous donne son sang à boire entant qu'il l'a une fois épandu pour le prix & satisfaction de nos offenses, afin que nous ne doutions point d'en re∣cevoir le fruit.

M.

Selon tes responses, la Cene nous ren∣voye à la mort & passion de Jesus Christ, afin que nous communiquions à la vertu d'icelle?

E.

Ouï: car alors le sacrifice unlque & perpetuel a esté fait pour nostre redem∣ption. C'est pourquoi il ne reste plus sinon que nous en ayons la jouïssance.

M.

La Cene donc n'est pas instituée pour f$ire une oblation du corps de Jesus à Dieu son Pere?

E.

Non: car il n'y a que lui seul à qui ap∣partient cét office, entant qu'il est Sacrifi∣cateur eternel. Mais il nous commande seulement de recevoir son corps, non pas de l'offrir.

DIMANCHE LIII.
M.

POurquoi est - ce qu'il y a double signe?

Page [unnumbered]

E.

Nostre Seigneur l'a fait pour nostre in∣firmité, afin de nous donner à connoistre, que non seulement il est viande à nos ames, mais aussi breuvage: afin que nous cherchi∣ons en lui nostre nourriture pleine & en∣tiero, & non ailleurs.

M.

Tous doivent-ils user in differemment de ce $$cond signe, assavoir de la coupe?

E.

Ouï, selon le commandement de Jesus Christ, contre lequel il n'est licite de rien attenter.

M.

Avons-nous en la Cene simplement le témoignage des choses susdites, ou si elles y sont vrayement données?

E.

Entant que Jesus Christ est la verité, il ne faut point douter que les promesses qu'il fait en la Cene n'y soyent accomplies, & que ce qu'il y figure n'y soit verifié. Ainsi selon qui le promet & represente, je ne doute pas qu'il ne nous fasse partici∣pans de sa propre substance, pour nous unir avec foi en une vie.

M.

Mais comment cela se peut-il faire, veu que le corps de Jesus Christ est au ciel, & nous sommes en ce pelerinage terrien?

E.

C'est par la vertu incomprehensible de son Esprit, laquelle conjoint bien les choses separées par distance de lieu.

M.

Tu n'entens donc pas que le corps soit enclos dedans le pain, ni le sang da$$s la coupe?

E.

Non: mais au contraire, pour avoir la verité au Sacrement, il nous faut ele∣ver nos coeurs en haut au ciel, ou est Jesus Christ en la gloire de son Pere, & d'ou nous l'attendons en nostre redemption: & non pas le chercher en ces elemens cor∣ruptibles.

M.

Tu entens donc qu'il v a deux choses en ce Sacrement: le pain materiel, & le vin que nous voyons à l'oeil, touchons a la main. & savourons au goust: & Jesus Christ, dont nosames sont interieurement nourries?

E.

Ouï: en telle sorte neantmoins que nous y avons mèsme témoignage, & comme un arrhe de la resurrection de nos corps, entant qu'ils sont faits participans du signe de vie.

DIMANCHE LIV.
M.

QUel en doit estre l'usage?

E.

Tel que dit Saint Paul c'est que l'homme s'éprouve foi - mesme devant que d'en approcher,

M.

En quoi se doit-il éprouver?

E.

Assavoir s'il est vrai membre de Jesus Christ.

M.

Par quels signes le pourra-t'il con∣noistre?

E.

S'il a vraye foi & repentance, & s'il aime ses prochains en vraye charité, & n'est point entaché de haine, ni rancune, ni division.

M.

Mais est-il requis d'avoir une foi & charité parfaite?

E.

Il faut bien que l'une & l'autre soit entiere, & non feinte: mais d'avoir une telle perfection, à laquelle il n'y ait que redire, cela ne se trouvera pas entre les hommes. Aussi la Cene seroit instituée en vain, si nul n'estoit capable de la recevoir, sinon qu'il fust du tout parfait.

M.

L'imperfection donc ne nous empesche point d'en approcher.

E.

Mais au contraire, elle ne nous servi∣roit de rien si nous n'estions imparfaits: car c'est une aide & soulagement de nostre infirmité.

M.

Ces deux Sacremens ne servent-ils point à autre fin?

E.

Si font: d'autant que ce sont signes & marques de nostre profession: c'est à dire que par elles nous protestons que nous som∣mes du peuple de Dieu, & failons confessi∣on de nostre Chrestienté.

M.

Que faudroit-il donc juger d'un homme qui n'en voudroit point user?

E.

Il ne le faudroit pas tenir pour Chre∣stien: car en ce faisant il ne se veut point consesser estre tel, & quasi tacitement il desavouë Jesus Christ.

M.

Mais suffit-il de recevoir une fois l'un & l'autre.

E.

Le Baptesme n'est ordonné que pour une seule fois. & il n'est pas licite de le reïterer. Mais il n'est pas ainsi de la Cene.

M.

La raison?

E.

Pource que par le Baptesme Dieu nous introduit & reçoit en son Eglise: apres nous y avoir receus, il nous signífie par la Cene qu'il nous veut continuellement nourrir.

DIMANCHE LV.
M.

AQui appartient-il, tant de bapti∣zer, que d'administrer la Cene?

E.

A ceux qui ont charge publique en l'Eglise d'enseigner: car ce sont choses conjointes que de prescher la Parole, & distribuer les Sacremens.

M.

N'y en a t'il pas certaine preuve?

E.

Ouï bien: car nostre Seigneur donne specialement la charge à ses Apostres tant de baptizer comme de prescher. Et tou∣chant la Cene il commande que nous la fassions à son exemple. Or il avoit fait office de Ministre pour la donner aux autres.

M.

Mais les Pasteurs, qui sont dispensateurs des Sacremens, y doivent-ils admettre sans discretion tous ceux qui s'y presentent?

E.

Touchant le Baptesme, pource qu'au∣jourd'hui on ne Padministre qu'aux petits enfans il n'est point besoin de discerner. Mais de la Cene, il faut bien que le Ministre reaarde de ne la point bailler à un homme qu'on connoist en estre du tout indigne.

M.

Pourquoi?

E.

Pource que ce seroit polluer & desho∣norer le Sacrement.

M.

Mais nostre Seigneur y a bien receu Judas, quelque méchant qu'il fust?

E.

Son iniquité estoit encore cachée: & bien que nostre Seigneur la connust, si n'estoit-elle pas notoire a tous.

M.

Que sera-ce donc des hypocrites?

E.

Le Ministre ne les peut exclurre com∣me indignes, mais doit attendre que le Seigneur ait relevé leur mechanceté.

M.

Et s'il en connoist quelques-uns indi∣gnes, ou qu'il en soit averti?

E.

Cela ne sussit point pour les exclurre.

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finon qu'il y ait approbation suffisante, & jugement de l'Eglise.

M.

Il faut donc qu'il y ait quelque ordre & police sur cela?

E.

Ouï, si l'Eglise est bien reglée: c'est qu'on depute des personnages pour veiller sur les scandales qui pourroient estre; & qu'iceux en l'authorité de l'Eglise inte$$|sent la communion à ceux qui n'en $word$ nullement capables, & ausquels on ne à peut donner sans deshonorer Dieu & $word$ dalizer les fideles.

Fin du Catechisme.
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