Page 102
FABLE LI.
LE Lyon tardif, et paresseux se cachant dans sa cauerne, imaginoit beaucoup des moyens pour attraper de la proye, pour se nourrir sans beaucoup de peine. Mais apres y auoir beaucoup pensè il s'aduisade dre, qu' il estoit malade, et que tous les animaux, qui le vien∣droient voir, luy seruiroyent de nourriture, apres qu' il les auroit deuorè. Il dit donc qu' il estoit malade, de sorte que beaucoup d'animaux le vindrent voir, qu' il deuora tous, les vns apres les autres. Vn seul estant eschapè par hasard, rencontrant le Re∣nard luy dit, n' as tu pas entendu que le Lyon nostre Roy est malade, et que nous l'auons estè voir? Je le sçay bien dit le Renard, et j' ay veu les pas de beaucoup d'animaux, qui sont entrès dans sa caverne, mais je ne vois point de vestige de ceux qui en sont sortis, c' est pourquoy je crois qu' il m' est fort dangereux de prendre garde à la sanctè incertaine du Lyon mon Roy, sans vn grand danger asseurè pour moy.
Le Sens MORAL.
CEtte Fable nous apprend, qu' il se faut deffier des finesses des grands, qui le plus souuent soubs de fausses apparences nous tendent des ambuches pour nous ruiner, et pour nous perdre.